Séance de rattrapage... Ces livres dont vous attendiez la sortie en poche. Notre sélection.
«Et, fermant les yeux, nous rêvons de ce jour où il y aura, à la place du pullulement infini, des ministres des chemins de montagne, des ministres des rues jolies et à enjoliver, des ministres de la sieste pour tous. Des ministres de l'importance du songe, de la musique et des mots.» À travers douze récits de résistance et d'espoir, Antoine Wauters donne une voix à ceux que la société réduit au silence. Ceux qui souffrent d'Alzheimer et fuguent en pleine nuit pour retrouver la liberté et les lieux de leurs souvenirs. Ces jeunes venus voir la mer pour fuir la grisaille de leur banlieue, et à qui la police interdit de se baigner. Tous prennent ici la parole, comme une arme contre les excès d'une époque qui menacent notre humanité.
« Ce que je veux moi, c'est porter le prénom que j'ai reçu à la naissance. Sans le cacher, sans le maquiller, sans le modifier. Sans en avoir peur ».
Elle est née Polina, en France elle devient Pauline. Polina en URSS, Pauline à Saint-Étienne. Elle se dédouble. D'un côté, la Russie de l'enfance, celle de la datcha, de l'appartement communautaire où les générations se mélangent, celle des grands-parents inoubliables et de Tiotia Nina. De l'autre, la France, celle de la materneltchik, des mots qu'il faut conquérir et des Minikeums. Il lui faudra tenir sa langue sans trahir ni oublier.
« Le 18 août 2021, j'ai passé la nuit au musée Anne Frank, dans l'Annexe. Anne Frank, que tout le monde connaît tellement qu'il n'en sait pas grand-chose. Comment l'appeler, son célèbre journal, que tous les écoliers ont lu et dont aucun adulte ne se souvient vraiment ? Est-ce un témoignage, un testament, une oeuvre ? Celle d'une jeune fille, qui n'aura pour tout voyage qu'un escalier à monter et à descendre, moins d'une quarantaine de mètres carrés à arpenter, sept cent soixante jours durant. La nuit, je l'imaginais semblable à un recueillement, à un silence. J'imaginais la nuit propice à accueillir l'absence d'Anne Frank. Mais je me suis trompée. La nuit s'est habitée, éclairée de reflets ; au coeur de l'Annexe, une urgence se tenait tapie encore, à retrouver. »Lola Lafon fait résonner la voix de l'adolescente fauchée par l'Histoire avec les fantômes de son propre passé. Bouleversant. Clémentine Goldszal, Elle.Un récit délicat et personnel. Virginie Bloch-Lainé, Libération.Prix Décembre Prix Les Inrockuptibles.
ANTONIO SCURATI est un romancier italien. La trilogie M est saluée par la critique internationale. Il reçoit le Prix Européen du livre pour son oeuvre.
Partir à la guerre à la place d'un autre, revenir en héros et se découvrir proscrit...
Des choses incroyables vous tombent dessus, détournent le cours de votre existence et le bouleversent de fond en comble.
Algérie, 1914. Pour le jeune berger Yacine, qui n'a jamais quitté son douar, ces choses incroyables vont l'emporter comme une crue à travers mille imprévus, lui feront connaître le monde moderne, celui des machines et des machinations, des tirailleurs loyaux et des trahisons, de la guerre des tranchées, des promesses piégées, et de l'amour simple et beau pour survivre dans l'adversité.
Cet ouvrage a fait partie de la sélection pour le Prix du Roman Fnac et pour le Grand Prix du Roman de l'Académie française
Gaspar est un artiste reconnu et sollicité. Pourtant, en ce début de printemps, il ne rêve que de quitter Paris et s'installer quelques jours Campo de'Fiori, à Rome. Là, à une terrasse de café, devant un jeu d'échecs, il joue contre des amateurs de passage et savoure la beauté des jours.
Un matin, une femme s'installe à sa table pour une partie. Elle s'avère être une adversaire redoutable et gagne très vite. Elle s'appelle Marya, vient de Hongrie. L'histoire entre eux naît sur l'échiquier, avant de se déployer ailleurs, singulière et douce.
Ce soir-là, quand Liam rentre des forêts montagneuses où il est parti chasser, il devine aussitôt qu'il s'est passé quelque chose. Son petit garçon de cinq ans, Aru, ne l'attend pas devant la maison. Dans la cour, il découvre les empreintes d'un ours. À côté, sous le corps inerte de sa femme, il trouve son fils. Vivant. Au milieu de son existence qui s'effondre, Liam a une certitude : ce monde sauvage n'est pas fait pour un enfant. Décidé à confier son fils à d'autres que lui, il prépare un long voyage au rythme du pas des chevaux. Mais dans ces profondeurs, nul ne sait ce qui peut advenir. Encore moins un homme fou de rage et de douleur accompagné d'un enfant terrifié. Dans la lignée de Et toujours les Forêts, Sandrine Collette plonge son lecteur au sein d'une nature aussi écrasante qu'indifférente à l'humain.
Au fil de ces pages sublimes, elle interroge l'instinct paternel et le prix d'une possible renaissance.
Un texte vertigineux. Christine Ferniot, Télérama.
Ce livre est exceptionnel. Bernard Lehut, RTL. PRIX JEAN GIONO 2022. PRIX RENAUDOT DES LYCÉENS 2022.
Appelée par son frère Olivier, Isabelle rejoint le village des Alpes où ils sont nés. La santé de leur père décline, il entre dans les brumes de l'oubli. Après de longues années de séparation, il s'agit peut-être de l'ultime possibilité de comprendre qui était cet homme destructeur, si difficile à aimer - et qui n'aura cessé de se dérober aux siens pour partir obstinément arpenter la montagne. Sur une poignée de jours, l'histoire familiale se noue et se dénoue. Quel drame s'est-il joué autrefois pour faire planer sur eux trois l'ombre des silences jamais percés ? À travers leurs voix qui se succèdent affleurent l'ambivalence des sentiments filiaux et les violences invisibles, ces déchirures qui poursuivent un homme jusqu'à son crépuscule.
Un chaman de Sibérie trouve sous le permafrost la sépulture d'une reine datant de plus de dix mille ans. Stupéfaction : le corps momifié par les glaces a la peau noire. Décidé à utiliser sa découverte pour protéger un territoire menacé par l'exploitation gazière, le chaman contacte un ami scientifique français dans l'espoir qu'il mobilisera les écologistes du monde entier. Celui-ci monte une discrète expédition avec une docteure germano-japonaise et un ethnologue congolais. Mais deux mafieux qui tiennent à leurs projets industriels les attendent de pied ferme... Un roman d'aventures palpitant au coeur des mondes visible et invisible, dans lequel Wilfried N'Sondé prône le lien, le partage, la transmission entre les peuples - l'harmonie du vivant.
Au château, il y a le père, vieux lion du cinéma français et gloire nationale. Il y a la jeune épouse, ex-Miss Provence-Alpes-Côte d'Azur, entièrement dévouée à sa famille et à la paix dans le monde. Il y a les jumeaux, la demi-soeur. Quant à l'argent, il a été prudemment mis à l'abri sur des comptes offshore.
Au château, il y a aussi l'intendante, la nurse, le coach, la cuisinière, le jardinier, le chauffeur. Méfions-nous d'eux. Surtout si l'arrêt mondial du trafic aérien nous tient dangereusement éloignés de nos comptes offshore.
«Qu'on me laisse parler de la façon dont la fréquentation des hommes m'a longtemps changée en servante, en muse et en geisha, de la façon dont ma volonté de les comprendre m'ampute de ma capacité à vivre lorsqu'ils sont là et qu'ils me regardent, j'emmagasine alors les impressions de vie pour les écrire et sentir quelque chose.» Emma vit à Berlin et vient d'avoir un enfant. À mesure que son quotidien se dessine, une douloureuse sensation d'étouffement la bouleverse. Peut-on rester femme en devenant mère ? Qu'advient-il du couple lorsque l'on devient parent ? Peut-on rester soi dans le désir des hommes ? Avec humour et mordant, Emma Becker confirme son talent littéraire.
France, milieu du XIXe siècle. Voici l'étonnante histoire d'Augustin Mouchot, fils de serrurier de Semur-en-Auxois, obscur professeur de mathématiques, devenu inventeur de l'énergie solaire grâce à la découverte d'un vieux livre dans sa bibliothèque. La machine qu'il construit et surnomme Octave séduit Napoléon III et recueille l'assentiment des autorités et de la presse. Elle est exhibée avec succès à l'Exposition universelle de Paris en 1878. Mais l'avènement de l'ère du charbon ruine ses projets que l'on juge trop coûteux. Après moult péripéties, dans un ultime élan, Mouchot tente de faire revivre le feu de sa découverte sous le soleil d'Algérie. Trahi par un collaborateur qui lui vole son brevet, il finit dans la misère, précurseur sans le savoir d'une énergie du futur.
Pascale Robert-Diard est l'une des grandes plumes du Monde, dont la patte est reconnaissable entre mille, sensible, vibrante, avec le sens du détail juste. Depuis vingt ans, cette grande journaliste tient la chronique judiciaire et a couvert des centaines de procès.
Il y a eu l'enfance heureuse. Partagée entre le Vésinet, où les parents aimants d'origine géorgienne s'étaient installés, et les séjours si doux, les premiers amours en Géorgie, l'été, chez les grands-parents. Fillettes, les deux soeurs se serraient les coudes quand les douanières de l'aéroport de Moscou les terrorisaient en menaçant de ne pas laisser repartir leur mère à Paris. Longtemps après, la mort du père a fait voler en éclats l'harmonie passée, la guerre a déchiré l'Abkhasie, et les soeurs, si proches, se sont éloignées l'une de l'autre.
Pourtant, elles s'aimaient.
« Car il a bien fallu que je me débrouille avec cette mystérieuse incohérence : toi la bonne fille, la petite sainte, tu n'as pas été sauvée, moi le démon j'étais vivante. Plus que vivante, miraculée. Il fallait donc que tu meures à six ans pour que je vienne au monde et que je sois sauvée. »
Un pavillon de banlieue. Trois jours. Deux frères et une soeur. Claire, l'aînée, infirmière et mère de famille harassée par le quotidien. Antoine, le benjamin, startupeur efficace mais en lutte contre le monde entier. Paul, le fils cadet, cinéaste en marge des siens, accusé de piller la vie familiale pour nourrir ses oeuvres... Réunis dans la maison de leur enfance, engoncés dans des costumes trop petits pour les adultes qu'ils sont devenus, tous souffrent du rôle qui leur a été attribué. À la veille de l'enterrement de leur père, les retrouvailles sont-elles possibles ? Alors que sonne le glas des règlements de comptes et que les souvenirs divergent, chacun aurait-il raison malgré l'autre ? Comme au théâtre, Olivier Adam met en scène un huis clos virtuose en trois actes, où ses personnages rejouent l'histoire de nos vies.
« Le roman renoue avec le picaresque et le réalisme magique qui épousent à merveille la plume de l'écrivain ».
Le Point.
Liwa Ekimakingaï est employé comme cuisinier à l'hôtel Victory Palace de Pointe-Noire. Il habite avec sa grand-mère, Mâ Lembé, chez qui il a passé son enfance, sa mère étant morte en lui donnant la vie. Un soir de 15 août où l'on fête l'indépendance du pays, il réunit ses plus beaux atours à peine achetés l'après-midi, et assez extravagants, pour aller en boîte. Car Liwa attend de rencontrer l'amour. Au bord de la piste de danse, la belle Adeline semble inatteignable. Pourtant, elle accepte ses avances, sans toutefois se compromettre. Elle signera sa fin...
« J'ai lu ce que tu as publié sur ton compte Insta. Tu es comme un pigeon qui m'aurait chié sur l'épaule en passant. C'est salissant, et très désagréable. Ouin ouin ouin je suis une petite baltringue qui n'intéresse personne et je couine comme un chihuahua parce que je rêve qu'on me remarque. Gloire aux réseaux sociaux : tu l'as eu, ton quart d'heure de gloire. La preuve, je t'écris. »Après sa trilogie Vernon Subutex, Virginie Despentes nous revient avec ces Liaisons dangereuses ultra-contemporaines, un roman de rage et de consolation, de colère et d'acceptation, où l'amitié transcende les faiblesses humaines.
Un soir, une jeune chienne, traînant une sale histoire avec sa chaîne brisée, surgit à la porte d'un vieux couple : Sophie, romancière, qui aime la nature et les marches en forêt, et son compagnon Grieg, déjà sorti du monde, dormant le jour et lisant la nuit, survivant grâce à la littérature. D'où vient cette bête blessée ? Qu'a-t-elle vécu ? Est-on à sa poursuite ? Son irruption va transformer la vieillesse du monde, celle d'un couple, celle d'une femme, en ode à la vie.
Alors que se multiplient à travers le globe les échouages de baleines, cinq hommes et femmes - des êtres blessés ou endeuillés, mais n'ayant pas renoncé à faire l'expérience de la beauté du monde et de la bonté - convergent vers une mystérieuse maison bleue surplombant une plage d'Islande où viennent mourir les cétacés. Ils ne se connaissent pas encore mais une nuit les attend, qui scellera à jamais leur destin.
Un mois d'août à New York, Line découvre dans un musée l'existence d'Albert Dadas, l'une des premières personnes atteintes de la "folie du fugueur", cette étrange maladie qui le poussa à plusieurs reprises à errer, sans souvenirs de la volonté même de ce départ. L'occasion pour Line de s'ouvrir à tant d'autres parcours, d'autres exilés, volontaires ou non. Et de conter leur trajectoire, leur quête d'une terre d'accueil et d'une identité à composer. Tout en mélancolie, le roman de Minh Tran Huy dessine une cartographie de l'arrachement à la terre en même temps qu'une poignante déclaration d'amour au père, lui-même "Voyageur malgré lui", celui par qui tout a commencé.
«Les lettres, la philosophie, la poésie sont propices à la mélancolie, voire à la folie, au moins, les maths et les équations serrent votre esprit dans un étau qui l'empêche de dériver vers les affres, les gouffres, il n'y avait qu'à voir le nombre d'écrivains qui s'étaient suicidés à cause de leurs questions insolubles et de leurs fichus baratins.» Un beau matin de juin, Rachel apprend qu'Adèle, son amie de toujours, s'est pendue chez elle à l'âge de 46 ans. Des années auparavant, au lycée, les deux jeunes filles avaient fait le pari fou de conquérir et de se partager le savoir : Rachel avait choisi les lettres, la «voie des filles», tandis qu'Adèle avait choisi les sciences, la «voie des garçons». Mais est-ce vraiment ainsi que les choses se passent dans la vie ? Pourquoi Adèle, brillante mathématicienne, mère d'un adorable enfant et compagne d'un mari aimant - la fille parfaite aux yeux de Rachel - a-t-elle cédé au désespoir ?
«L'herbe avait bleui dans les ombres du soir, tout comme le profil de Sam dont les yeux harponnaient loin, iris rétroéclairés par les lumières du tableau de bord. Je lui ai trouvé cet autre visage que j'allais devoir apprendre à connaître, l'air habité de ceux qui mettent le réel à distance, ceux qui dévient en douce, décollent, glissent dans l'illusion.» Une Parisienne exilée dans une petite ville du Colorado s'acclimate difficilement à sa nouvelle vie, contrairement à son compagnon, dont la voix et la personnalité se mettent à changer... Autour de cette novella centrale se déploient et se répondent sept autres récits qui font la part belle aux femmes - solitaires, rêveuses, volubiles, hantées ou marginales. D'une nouvelle à l'autre, Maylis de Kerangal questionne la manière dont le temps érode les êtres et leurs liens : qu'est-ce qui reste, se transforme, ou disparaît ?
« La vie de mes parents, c'est comme la guerre du Liban. Plus je m'y plonge, moins j'y comprends quelque chose. J'arrive à situer les protagonistes, quelques moments marquants me restent, puis, ensuite, je me perds. Trop de dates, d'événements, de trous, de silences, de contradictions ».
Sabyl a la trentaine. Il est né à Paris de parents libanais, tenus éloignés de leur pays par la guerre. Pourtant, à Paris, Beyrouth est partout. La famille élargie est restée là-bas. Seuls quelques allers-retours et WhatsApp les relient. Une part manque. Sabyl veut la combler. Micro en main, il leur demande de raconter.