Comment les oeuvres, par leur présence, leur aura, bouleversent la vie et le rapport aux êtres, aux choses, d'un petit garçon vivant a priori loin de ces préoccupations. Comment leur perception se mêle à sa vie et combien celle-ci fait retour sur le regard porté sur l'oeuvre.
À le prendre à la lettre, le terme de monographie paraît insuffisant pour qualifier l'ouvrage d'Armand Dupuy.
Sous-titrée « Récits, pensées, dérives & chutes », cette longue étude de la peinture de Jérémy Liron désarçonne dès les premières lignes en restituant en flux de conscience le désarroi d'un chaos de sensations - approche fort subjective, annonciatrice d'une diversité inattendue des régimes d'écriture. Et de fait, si la suite de l'ouvrage réserve des analyses d'une clarté toute classique, ce désemparement initial marque la recherche de bout en bout : « ce qu'on voit face à une peinture n'est que notre propre contact avec elle », selon la formule de Bernard Noël qui sert de boussole à l'auteur. L'enquête prend l'allure d'un drame introspectif.
Elle ne sondera pas seulement l'oeuvre, mais aussi bien celui qui prétend la voir et l'écrire.
On cherche avec les yeux ce que veulent dire passage et lenteur, ligne et retrait - fil de bave encore. On s'accroche, on refuse de s'accrocher. Il faudrait lâcher ce bleu, ce noir en tête et laisser faire la lumière un peu sale jusqu'à la têtue détresse. Monter quand même, rassembler les papiers, regarder. On pèse à moitié sur les raisons d'exister, dans un léger bruit de plumes - son sourire n'y peut rien.
Si les grandes boîtes bleues sont d'abord les contenants d'une archive familiale, notamment photographique, elles deviennent très vite autre chose et davantage dans les poèmes de ce recueil. S'il existe un plaisir manifeste à fouiller ces boîtes, à en extraire des fragments, il existe également le plaisir de travailler la boîte travailleuse elle-même : le poème devient cette boîte sonore qui cherche et s'anime : par glissades, sursauts, contritions,...
Les poèmes qui composent cet ensemble, dont les plus anciens datent du début des années 2000, sont pour la plupart des poèmes de rebut, insatisfaisants, partiellement oubliés, abandonnés dans des dossiers éparpillés. Ils formaient ainsi une « archive négative », une archive du manque, du raté, du mal dit, mal senti.
Ils ont été repris, réécrits et assemblés par l'auteur sans savoir s'ils seraient à même de devenir autre chose que ce qu'ils étaient.
Présentation de peintures de J. Liron de la série Lyon-Béthune accompagnées de textes sur le travail de l'artiste.