Ilan Manouach commet son détournement annuel, après Katz (détournement de Maus, de Spiegelman), Noirs (détournement des Schtroumpfs Noirs de Peyo et Delporte), Riki (détournement de Petzi fermier), en réponse à la nouvelle collection 48cc de L'Association. Un monde un peu meilleur n'est pas un fac-simile du récent album de Lewis Trondheim paru à L'Association : il en est une interprétation, qui montre tout le pouvoir signifiant du format. En hommage à Jean-Christophe Menu (qui forgea l'expression « 48cc » pour la décrier) et à sa passion pour le disque vinyle, cette version a un format carré, qui s'écarte délibérément du standard industriel. Il dépassera donc de la bibliothèque du bédéphile.
Joel Kupperman était l'enfant prodige, le gentil garçon yankee pendant la Seconde Guerre mondiale, connu dans tous les foyers américains grâce à ses apparitions remarquées dans la célèbre émission Quiz Kids. Il résolvait des problèmes de mathématiques en un temps record, mais personne ne lui expliquait la solution d'un autre problème : ce qu'il ferait quand il serait vieux. Enfant, il connaissait toutes les réponses, mais aujourd'hui, atteint de démence, il a du mal à répondre aux questions de son fils. Pourtant, c'est Michael Kupperman, lauréat du prix Eisner, qui écrira la biographie de son père.
Ugly Babies a neuf chapitres, comme les neuf mois de la grossesse. Léonie mène l'existence ennuyeuse d'une adolescente ordinaire, lorsqu'elle découvre qu'elle est enceinte. Elle décide, sans conviction, de garder le bébé et sa vie bascule dans le cauchemar : une pandémie de nouveaux-nés anthropophages et matricides s'abat sur la planète. Qui mène sa vie, qui dirige son existence, qui choisit ? Léonie est comme mue par une force extérieure. Quelle est cette force, quel est son but ? Parviendra-t-elle à sauver le monde, ou simplement elle-même ?
Un limerick est un poème humoristique, à l'origine en anglais, de 5 vers rimés (rimes aabba), de caractère souvent grivois, irrévérencieux ou irréligieux. Un rimelick ou une rimelique est une fantaisie parisienne dûe à l'imagination à la métrique rigoureuse de Gérald Auclin (Dame Pipi Comix, The Hoochie Coochie). Nul badaud de Paris n'échappe à cette fusion de l'irrévérence rabelaisienne et de l'absurdité britannique.
Un tram qui n'arrive pas, un drap qui flotte dans le ciel, tel un fantôme, des néons mal installés sur l'enseigne d'un magasin, un livre et une diapositive. "Le Titre ne convient pas" trace les rapports entre des objets et des idées éloignés dans le temps et dans l'espace, mais qui, finalement, nous mènent toutes en un lieu inhospitalier et nocturne. Un livre qui commence par l'évocation d'un autre livre et celle d'un poème de J. E. Eieleson pour nous parler de nos relations avec nos ancêtres et avec les traces laissées par l'Histoire et les hommes, la façon dont s'organisent notre mémoire et nos souvenirs et les petites épiphanies domestiques, pour finir somnambules sous un pont de Rome.
Ce livre met en parallèle le thème du voyage et celui de la vie de couple. Les étapes de voyage sont utilisées comme métaphore des différentes phases de la relation amoureuse. Le couple est placé dans un univers métaphorique à la fois actuel et intemporel. Bien que les éléments appartiennent à une époque contemporaine, ils sont choisis pour leur capacité à renvoyer à des « situations type ». L'aéroport, l'autoroute, la plage ou le camping sont des lieux chargés de références communes. Ce sont aussi des espaces à l'intérieur desquels la manière de se déplacer est très dirigée, ce qui correspond à la mise en place d'un circuit de lecture en étapes. Quant aux personnages, ils sont soumis à la même logique que le décor. Ils n'ont pas de prénom, pas de caractères clairement identifiables, pas d'histoire. Sans vêtements, ils n'appartiennent à aucune époque précise. Interchangeables, ils sont finalement davantage pions que personnages. Leur nudité les rend vulnérables, et les ramène à un état primaire, en décalage avec les lieux dans lesquels ils évoluent. Des scènes qu'ils pourraient connaître dans leur vie quotidienne sont extraites de leur contexte et placées dans un univers allégorique. La mise à distance de toute particularité permet de renvoyer le lecteur à des situations qu'il connaît, de manière à pouvoir ensuite les détourner de leur sens habituel : tout le monde sait comment fonctionnent un aéroport et une relation de couple, mais pas qu'un aéroport peut fonctionner comme une relation de couple. L'histoire racontée est à chaque fois un peu la même, et un peu différente, comme si les personnages répétaient la même pièce de théâtre en s'amusant à changer de décor ou à intervertir leurs rôles. Car tour à tour, au fil des séquences, les personnages échangent leurs places. C'est une histoire qui n'avance pas. C'est un circuit qui tourne en rond, tout comme la vie de couple lorsqu'elle répète inlassablement les mêmes scénarios. Les personnages sont enfermés dans un jeu les condamnant à parcourir sans fin la boucle d'un même plateau.
Depuis une dizaine d'années, Tétshim et Frank Mukunday fabriquent des films d'animation en partant de la pratique du dessin et de la vidéo. Avec des matériaux bruts (cailloux, craie, objets rouillés), ils créent un univers formel qui s'accorde à leur propos. "Machini", leur dernier film d'animation, un hommage à leur ville, la cité minière de Lubumbashi, révèle les conséquences fatales de l'exploitation des minerais.
Adapté en bande dessinée, "Machini" raconte la pollution et la destruction de l'homme par l'homme dans l'espace de la mine qui jouxte la cité. Partant d'une observation documentaire, ce livre est un voyage critique de l'industrialisation du monde, qui fragilise l'environnement et les sociétés humaines.
Les grandes oeuvres ont toujours inspiré les artistes des générations suivantes. Certaines images deviennent iconiques et suscitent l'envie d'y revenir. En croisant les références de la culture populaire (BD, cinéma, street art...), Chanic nous propose d'infinies variations autour d'une image qui, à l'origine, faisait l'éloge de la ténacité lors d'une séquence inoubliable qui procédait déjà de l'itération.
Les murs de la City ne résonnent plus que des incroyables exploits de la "Marque Jaune". Ce mystérieux criminel multiplie les actions spectaculaires : raid contre la banque d'Angleterre, vol du Gainsborough de la National Gallery, et même vol de la couronne royale d'Angleterre... Rien ne semble pouvoir l'arrêter. Son audace va jusqu'à prévenir à l'avance la police du lieu de l'accomplissement de ses forfaits, ridiculisant à chaque fois un peu plus Scotland Yard. L'apparente facilité avec laquelle il se déjoue des dispositifs policiers finit par inquiéter les plus hautes instances du pays. Le capitaine Francis Blake est dépêché par le Home Office auprès de Scotland Yard pour élucider l'affaire et découvrir l'identité de l'homme qui se cache derrière la Marque Jaune. Le capitaine s'adjoint tout de suite les services de son vieil ami, le professeur Philip Mortimer, dont les connaissances scientifiques s'avéreront précieuses dans cette affaire extrêmement complexe. Avant d'entamer son découpage, Jacobs rédigeait son scénario sous la forme d'un texte aux allures littéraires... D'emblée, ce texte faisait ressortir la redondance entre les dialogues et la description des actions. À l'arrivée, une bonne partie de ce texte était conservée dans les récitatifs. Peut-être tenait-il à démontrer son habileté littéraire (qui est réelle, même s'il n'innove pas) et avait-il du mal à couper dans son texte. Mais, en plus, comme l'homme est profondément angoissé à l'idée que le lecteur ne passe à côté de l'histoire, il redoublait les informations dans la mise en scène et dans la mise en image. C'est dire le peu de confiance que Jacobs accordait à l'intelligence du jeune lecteur, le peu de confiance qu'il accordait à son propre «medium», à l'efficience de la bande dessinée. À moins qu'il ne s'adressait au non-lecteur de bande dessinée, aux anicorètes, sachant que la lecture d'une bande dessinée est un processus complexe et exige une compétence spécifique. «La Marque Jaune», dans sa version littéraire, ne retenant que les récitatifs et les dialogues, sous-titrée roman, est un livre non lu. Non lu à double titre, parce qu'on ne lira pas ce texte : on préfèrera la bande dessinée et ses images, mais, quand on lira la bande dessinée, on se passera de lire les récitatifs redondants, et parfois même, les dialogues inutilement longs et explicatifs. De sorte qu'au final, la retranscription systématique de ces textes relève d'un geste absurde, en fait une performance poétique.
Les talents et les styles de Tommi Musturi sont multiples. "Beating" précède, 8 ans avant, "Cracking" qui paraît en 2021. Les deux ouvrages rassemblent les travaux graphiques que l'auteur a réalisés pour différents supports. Il contient des travaux plastiques personnels, des illustrations de presse, des pochettes de disque, des croquis, du pixel art, etc. C'est un foisonnement de styles, de techniques et de points de vue, débordant de formes et de couleurs.
À l'occasion de la sortie de "Cracking", "Beating" reparaît. Tommi Musturi (né en 1975) est un auteur et un artiste finlandais qui s'exprime le plus souvent en bande dessinée. Véritable caméléon stylistique, il traite souvent de thèmes existentiels autour de l'idéal de la «liberté». Il emprunte une grande diversité de moyens, du simple griffonnage à la création ex abrupto de style spécifique au discours. Musturi est également éditeur et curateur. Il a déjà commis plus de quarante publications, du fanzine à la monographie en passant par la bande dessinée et il a participé à plus de 200 expositions à travers le monde. Ses oeuvres les plus célèbres sont les bandes dessinées « Samuel » et « Les Livres de M. Espoir ».
Musturi vit avec sa femme et sa fille dans le petit village de Siuro, dans le sud de la Finlande. Il travaille au sein du collectif de bandes dessinées contemporaines Kutikuti (2005-).
En géologie, géomorphologie et géographie physique, un horst désigne un bloc soulevé appartenant à la portion de croûte terrestre qui est restée stationnaire ou s'est soulevée tandis que, de chaque côté, les compartiments voisins s'abaissaient. Xavier Mussat a collecté ses concrétions graphiques dans quatre carnets réunis ici en un volume.
Derrière les délicats ourlements brodés et sous la couture, il y a l'hymen déchiré et le placenta. Aurélie William Levaux tisse ses rêves d'interrogations doulou-reuses. Sous le fard de ses paupières, pendant son sommeil tourmenté, l'éternel aiguillon du désir féminin : "faire la maman et la putain ?".
Fil conscient, fragile, douloureux, toile écrue et colorée, motifs végétaux évoquant une sexualité onirique et fertile, les entrelacs d'Aurélie W. Levaux enserrent le lecteur dans une psyché trouble, où la bouche de l'enfant tête le sein tandis que les lèvres rubis de la mère s'offrent au plaisir. Aurélie Levaux, dans un miroir brisé qui nous la reflète en facettes multiples et dissonantes, coud à même sa peau un récit extraordinaire de désirs et de vie, et nous livre encore une fois son coeur, cru et tendre comme la main d'un nourrisson.
On songe souvent à Frida Kalho, et à toutes les femmes exceptionnelles qui ont su, dans l'histoire, rendre la complexité du sexe, du désir et de la maternité avec les accents de la vérité et les ornements les plus éblouissants.
Après Menses Ante Rosam, les éditions de la Cinquième Couche proposent ici une nouvelle édition des Yeux du Seigneur, cartonnée et en dos toilé.
Première bande dessinée synthétique entièrement produite (texte et dessins) par une IA émergente, Fastwalkers est une méditation non linéaire sur le deep learning (apprentissage profond, méthodes d'apprentissage automatique et de modélisation par transformations non linéaires). Fastwalkers déploye la poétique imprévisible de l'informatique générative et explore son potentiel. Inéluctablement, elle engendre de nouvelles potentialités sensorielles chez les lecteurs. Né de l'expérimentation continue de Manouach sur l'abondance informationnelle et les économies affectives de la bande dessinée, Fastwalkers est un livre hallucinogène dans lequel tous les textes et les images ont été produits par l'apprentissage automatique et l'intelligence artificielle. Depuis son origine, à la fin du XIXe siècle, l'industrie de la bande dessinée s'est développée en symbiose avec le développement des technologies d'impression, de distribution et de communication. En tant que média hautement technologique, avec ses communautés actives en ligne, la bande dessinée se prête aux processus programmatiques de l'apprentissage automatique. Les processus synthétiques de l'IA remodèlent la façon dont nous produisons, consommons, archivons et comprenons tous les médias, y compris la bande dessinée. Cocréé avec les IA de dernière génération (GAN, GPT-3) et développé par une équipe interdisciplinaire d'informaticiens, de codeurs et de designers, Fastwalkers est le résultat de la concaténation d'ensembles de données communautaires, d'algorithmes propriétaires, de régimes d'indexation, de tests bêta et de modèles génératifs, tous entraînés sur des millions d'unités de données et de corpus, spécialement pour réaliser ce livre. Le résultat est un paysage sémantique en mille-feuilles de nappes ambiantes dont les harmonies et les dissonances révèlent la nature composite et conglomérée de la connaissance et de ses échanges. Fastwalkers est un Hentaï méditatif et violent qui questionne les limitations cognitives de l'humain aux prises avec le caractère exponentiel de la cognition machinique, bientôt dépassé par le produit de son propre génie.
L'oeuvre poignant de Judith Forest enfin réédité en intégrale : les cultissimes 1h25 et Momon, Mister John, Travelling, etc. accompagné d'un appareil critique, des entretiens avec l'auteure, les articles marquants de l'époque, des croquis et dessins préparatoires.
Judith Forest est une comète. Au long de sa courte et brillante carrière, qui n'aura duré que trois ans, elle aura été l'auteure de deux livres qui auront marqué leur époque et défrayé la chronique, avant de disparaître sans laisser de trace. Elle avait à peine plus de vingt ans (sa date de naissance est incertaine). Dans le second de ses livres, elle évoquait déjà son désir et son impression de disparaître, et son envie de se consacrer, loin du monde et des hommes, à l'herboristerie.
Avec des contributions de Xavier Löwenthal, Thomas Boivin, William Henne, François Olislaeger, Fabrice Neaud, Thierry Groensteen, Morgan di Salvia, Clément Solym, Memphis Jack, Alain Lorfèvre, Romain Brethes, Nicolas Ancion, Marine Gheno et Christophe Poot.
Dans la mythologie grecque, Ouranos ( ???a???: « celui qui fait pleuvoir ») est une divinité primordiale personnifiant le Ciel et l'Esprit démiurgique. Ce livre fait suite à Gaia, premier livre (et grand succès) de Thierry Cheyrol, paru en 2017 à La 5e Couche. Gaia (la Terre) est l'épouse d'Ouranos. Tel le Dieu de la Genèse séparant le firmament de la terre, Cheyrol se tourne (naturellement) vers les astres, après avoir exploré les entrailles fécondes de notre planète. Ainsi découvre-t-on une continuité, un isomorphisme, une «isoplastie», du bas et du haut (si tant est que ces mots aient encore du sens), du micro au macro. Il est un mot galvaudé, dès qu'il s'agit d'aborder l'oeuvre d'un auteur, qu'il faudra bien employer ici: Cheyrol nous délivre un Univers. Des astres imaginaires et d'improbables aérolithes filent au long des pages, comme autant de motifs graphiques qui n'ont d'abstraits que l'apparence. Le dessinateur décrit des invasions, des connexions, des fusions, des propagations, des conflagrations et des conquêtes, dans un bouillonnement dont on ne sait s'il est cataclysmique ou créateur, à moins que ce ne soit la même chose.
2280 compile une collection de fameuses couvertures de bande dessinée déconstruites et reconstruites artisanalement (au feutre) selon un algorithme singulier mis au point par l'auteur. Il y a 150 ans, l'art moderne s'est appliqué à mettre à mal la figure, à coup de schématisation, de géométrisation, de déconstruction jusqu'à son oblitération (impressionnisme, cubisme, suprématisme...) Depuis, les artistes jouent de cette tension entre abstraction et une figure qui n'a cessé de réapparaître depuis.
Le résultat kaléidoscopique des "2280" relève d'un nouveau type de tension : la figure est quasi-absente, non pas invisible, parce qu'elle est entièrement là, certains diraient subliminale. Si on s'éloigne, le motif se révèle parfois. La figure est rendue absente mais elle est en même temps bien présente dans la mémoire de l'amateur de bande dessinée. La tension figuration-abstraction se joue dès lors exclusivement dans la tête du regardeur, entre les formes éclatées que son oeil perçoit et ses souvenirs.
L'atomisation de cette image, a priori unique (la plupart des couvertures de livre ne montrent qu'une seule image), sa dissolution géométrique dans une grille renvoie à cette autre grille, celle qui opère au sein des planches de bande dessinée.
Entre fulgurances des lignes, magmas plastiques et gestes spontanés, Con-descendance met en exergue cinq années de désorganisation, de travail de sape et de valorisation du rien. En accompagnant ses figures hallucinées d'une philosophie du muscle et d'une critique des éléments offerts dans la lecture quotidienne du monde, Silio Durt révèle l'univers de l'en-deçà, les strates inavouables qui émanent des exactions de chacun et de l'accumulation des informations quotidiennes. Les névroses sociétales sont détournés afin de mettre en lumière, dans un flux généreux, une esthétique agressive?; une pensée en mouvement placée au service des êtres désaxés. Enfin, un bestiaire provocateur et enragé sort de l'atelier pour se faire l'avatar du Mongol Jovial. Cohérent en ce qu'il a de plus violent, les moyens d'arriver à cette joyeuse décontenance sont multiples?: de la tâche à la purulence des lignes, du monochrome sériel aux couleurs dégoulinantes. Silio Durt crée une ode au désordre, fluctue entre les schèmes classiques du beau et du bien?; il donne à voir un monde engagé où tout est à réinventer sous le rythme frénétique de la crise et de la décroissance. A. Spiegeler Con-descendance reprend toute une série de portraits réalisés par Silio Durt entre 2015 et 2020. Il s'agit d'une série de portraits d'enfants souriants à l'objectif du photographe scolaire, l'image parfaite de l'enfant sage, propre, en bonne santé, tel qu'on le montre encadré sur le buffet de la grand-mère, aux amis de la famille ou sur un réseau social. A ces image proprettes, Durt sur-imprime ces mots violents qu'ils ont tous entendus et qui, fatalement, les marquent et les poursuivent. Face à ces portraits, l'écrivain Vån TTX a placé des textes en rapport avec la violence des dessins.
Dans le jargon de l'édition, 48CC désigne une bande dessinée de tradition franco-belge, de 48 pages, en format A4, cartonnée et en couleur.
Le 48CC est la pagination la plus économique, devenue la norme parce qu'elle est réputée plaire aux enfants. Ilan Manouach achète, dans le marché de seconde main, quarante-huit albums 48CC appartenant aux séries les plus populaires de la bande dessinée franco-belge, suivant le guide Moliterni. Les albums sont soigneusement scannés et chacune de leurs 2.034 pages au total est numérisée et nommée selon une classification simple où le numéro de page est suivi du titre de l'album. Par exemple : 34_La Horde du Corbeau. Toutes les pages de tous les albums portant le même numéro sont transférées dans un dossier spécifique.
Ainsi, dans le dossier 34, on trouvera rassemblées toutes les trente-quatrièmes pages des quarante-huit albums scannés. Un total de quarantehuit nouveaux dossiers représenteront les quarante-huit pages de notre livre final. Le contenu de chacune des pages du livre final sera le produit de manipulations entamées sur les quarante-huit pages des albums scannées portant le même numéro. Les livres sont lus attentivement.
Récit non-linéaire de petites histoires quotidiennes de tout un chacun, Les Gris colorés est une série d'histoires courtes et de dessins mettant en rapport les sensations des personnages avec des couleurs afin de mettre en évidence la signification émotionnelle de chaque situation. Ces gris colorés sont une source sur notre nature d'homme et de femme dans notre société contemporaine.
Le langage des bulles y est quasiment absent, comme pour mieux laisser place à celui de la couleur, au dialogue entre contour et surface.
Se dégageant de la perspective et de la représentation de l'espace, Victor Hussenot donne la part belle au ressenti de ses personnages. Mettant la forme au service du fond, assumant le vide au profit du plein, il se débarrasse de la case et de la bulle, jouissant ainsi de l'espace de la planche. La séduction immédiate que procure la couleur, faisant écho au blanc de la page et aux contours net de son trait, confère au livre son accessibilité et sa facilité de lecture.
Cette nouvelle édition est augmentée de 8 pages.
Anthologie de l'esprit est un recueil d'histoires courtes réalisées par l'auteur finlandais Tommi Musturi (Sur les pas de Samuel, Les livres de monsieur Espoir, Beating...) ces vingt dernières années. Il constitue une plongée dans la diversité formelle et narrative de son oeuvre en bande dessinée.
Musturi utilise et éprouve de nombreux styles et manières de raconter pour livrer des messages et des idées souvent complexes. L'Anthologie de l'esprit s'achève par un article sur le «style» en tant qu'outil cardinal du dispositif artistique et narratif.
Après une dure journée d'usine, quoi de mieux que d'aller s'en jeter un petit derrière le gosier? Après Querelle de Brest, après l'Opéra de Quat'Sous, Hareng couvre-chef est une évocation mythique et fantasmée des caves enfumées et des tangos au bord des docks. Dans ce récit illustré, le trait expressif et éclaté émerge des fumées irritantes des bas-fonds esquissés par Christophe Poot. Il réinvite une langue qui mêle à la fois onomatopées et expressions créées de toutes pièces. Ce livre est paru en 2001, mais l'auteur n'a depuis pas abandonné ses penchants pour le monde maritime, tant s'en faut. C'est donc une édition riche d'une dizaine de textes et d'illustrations inédites, présentées comme des chansons évoquant la vie des marins, le travail dans la marine marchande et la beauté des sites portuaires. Le style graphique s'est entretemps légèrement dépouillé, le style littéraire aussi, ce qui augmente encore l'intérêt de présenter cette ré-édition et ses prolongements dans l'imaginaire de l'auteur. Nous avons aussi voulu, pour cette présente édition, soigner particulièrement le choix du papier, des typographies et la fabrication du livre, pour vous offrir une lecture optimale de ce petit ouvrage à l'argot poétique et au dessin expressionniste.
L'idée est pourtant simple, puisque c'est celle d'une rencontre. Bien sûr, il y avait la covid, la crise sanitaire, l'annulation des festivals, le confinement et tout cet "inconnu" qui nous est tombé dessus. C'était un temps de tarissement du geste artistique qui plus est pour le spectacle vivant qui ne trouvait plus l'élément essentiel à son existence ; le rassemblement physique d'êtres humains autour d'une oeuvre que réalisent dans l'instant des actants.
Le théâtre des Doms imagine donc des rencontres entre les artistes dont il a programmé le spectacle dans le cadre du festival d'Avignon et des auteurs graphiques. Pari délicat et fragile, risqué peut-être. Les artistes ne se connaissaient pas et ne savaient rien de leur travail respectif et, pour corser la chose, celles et ceux qui allaient produire du dessin, n'avaient pas vu les spectacles en question.
Travail à l'aveugle avec pour seul support, une heure de visioconférence ! Le livre rassemble les contributions graphiques de Thomas Mathieu, Fabienne Loodts, Aniss El Hamouri, Aurélie William Levaux, William Henne, Xavier Löwenthal, Emilie Plateau, Aurélia Maurice et Pablito Zago. En coédition avec le Théâtre des Doms.
En coédition avec IMAGEs Suite à une douloureuse rupture, Benjamin Monti remplit une multitude de pages de textes et de dessins. Pendant de longues années, il les reprend, les oublie et les publie en polycopies confidentielles, sans jamais achever l'oeuvre devenue monumentale. Une centaine de fragments recomposés par l'artiste et l'essayiste reparaissent et présentent des séquences poétiques habitées par une intense fièvre créatrice.
S'y dévoile ce qui finit et que personne n'achève jamais : le deuil, la vie et l'amour. Avec un essai inédit de Jean Charles Andrieu de Levis.