Dans un petit village abandonné de la «zone grise», coincé entre armée ukrainienne et séparatistes prorusses, vivent deux laissés-pour-compte: Sergueïtch et Pachka. Désormais seuls habitants de ce no man's land, ces ennemis d'enfance sont obligés de coopérer pour ne pas sombrer, et cela malgré des points de vue divergents vis-à-vis du conflit. Aux conditions de vie rudimentaires s'ajoute la monotonie des journées d'hiver, animées, pour Sergueïtch, de rêves visionnaires et de souvenirs. Apiculteur dévoué, il croit au pouvoir bénéfique de ses abeilles qui autrefois attirait des clients venus de loin pour dormir sur ses ruches lors de séances d'«apithe´rapie». Le printemps venu, Sergueïtch décide de leur chercher un endroit plus calme. Ayant chargé ses six ruches sur la remorque de sa vieille Tchetviorka, le voilà qui part a` l'aventure. Mais même au milieu des douces prairies fleuries de l'Ukraine de l'ouest et du silence des montagnes de Crimée, l'oeil de Moscou reste grand ouvert...
Après une violente bousculade lors d'un mouvement de foule, Francysk, jeune homme de 16 ans qui étudie la musique dans une ville de Biélorussie, tombe dans le coma. La plupart de ses proches l'abandonnent : sa petite amie trouve un autre copain, sa mère refait sa vie avec son médecin et fonde une nouvelle famille. Seule sa grand-mère Elvira prend soin de lui, lui rend visite chaque jour et veille à ce qu'il soit bien soigné.
Après dix ans de coma, Zisk se réveille. On lui annonce que sa grand-mère est décédée. Il comprend alors que ses proches ont changé de vie. Mais dans le pays, tout est comme avant : un président très autoritaire est toujours au pouvoir ; les jeunes quittent la Biélorussie, et la police réprime toute tentative de contestation. Le jeune homme trouvera-t-il sa place dans ce pays figé ?
Un roman annonciateur de la situation politique en Biélorussie aujourd'hui. Dans son avant-propos, Filipenko écrit : « Tout ce que j'espère sincèrement, c'est qu'un jour, dans mon pays, ce livre cessera d'être d'actualité... »
C'est la fin des gardes-frontières et des contrôles de passeports, un immense espoir pour un pays minuscule: le 21 décembre 2007, à minuit, la Lituanie intègre enfin l'espace Schengen. Comme beaucoup de leurs compatriotes, trois couples se lancent dans la grande aventure européenne. Ingrida et Klaudijus tentent leur chance à Londres. Barbora et Andrius à Paris. Et si Renata et Vitas restent dans leur petite ferme, eux aussi espèrent voir souffler jusqu'à l'Est le vent du changement. Mais l'Europe peut-elle tenir ses promesses de liberté et d'union? Estampillés étrangers, bousculés par des habitudes et des langues nouvelles, ces jeunes Lituaniens verront l'eldorado s'éloigner de jour en jour. Mais pour Kukutis, un vieux sage qui traverse l'Europe à pied, «Peu importe la ville où l'on veut atterrir, c'est le voyage lui-même qui est la vie». Dans ce roman tour à tour drôle, tendre et mélancolique, Kourkov donne un visage à tous les désenchantés du rêve européen.
Ukraine, 2015. Sergueï Bounine devient président de la République presque par hasard. Froussard, anxieux, affublé d'un coeur malade, il se terre dans son bunker doré et se remémore ses années de jeunesse, période soviétique. À présent, il doit affronter les défis du post-communisme : hégémonie du grand frère russe, corruption, désordre moral. Et se méfier de tout, même des chocolats de l'ambassadeur parfumés au poison...
Écrit en 2004, ce roman d'anticipation mordant et prémonitoire a été depuis interdit par deux fois en Russie.
Avez-vous déjà entendu parler de «l'antifrousse»? Ce breuvage made in Ukraine qui permet de vaincre sa timidité, de triompher de ses ennemis, de surmonter toutes les épreuves. Un remède pour lequel on tuerait père et mère, n'est-ce pas? Mais là, c'est son inventeur, un estimable pharmacien de Kiev, qui est assassiné. Ensuite? Ensuite tout se complique. Dans cette fable échevelée, les chats ressuscitent, un somnambule se fait suivre la nuit, un député ambitieux exige un lait très spécial, une organisation secrète manipule les braves gens... Trafics et tentatives de corruption s'enchaînent aussi vite que les énigmes (et les rasades de gnôle à l'ortie!) pour tisser peu à peu la trame d'un roman savoureux.
Andreï Kourkov, l'auteur du célèbre Pingouin, a mis entre parenthèses son prochain roman depuis le 21 novembre 2013. Chaque jour ou presque, il s'est rendu sur le Maïdan de Kiev occupé par les manifestants. Son journal, établi à partir de notes prises sur le vif, raconte un quotidien en temps de révolution et livre un regard à la fois politique et intime, décalé et émouvant, sur les événements qui secouent son pays.
« J'habite à cinq cents mètres du Maïdan. Depuis mon balcon, on aperçoit les bulbes du clocher de la cathédrale Sainte-Sophie. Quand des amis viennent chez moi, je leur montre ces bulbes dorés - presque un emblème de l'antique cité de Kiev. Mais ces derniers mois, mes amis d'autres villes et d'autres pays ne viennent plus ici. Et du haut de mon balcon, je regarde souvent la fumée qui s'élève au-dessus du centre de la ville. Cette fumée noire, épaisse, celle des barricades en feu, est devenue le nouvel emblème non seulement de Kiev, mais de l'Ukraine tout entière. » A. K.
Il se passe des choses étranges, la nuit, à Lviv. Lorsque Alik le hippie se rend au cimetière pour honorer la mémoire de Hendrix - dont la main droite a été enterrée là trente ans plus tôt -, le capitaine du KGB qui le persécutait dans sa jeunesse lui avoue avoir toujours partagé son admiration pour le dieu occidental de la guitare. La nuit encore, après que Taras, « vibrothérapeute » d'un nouveau genre, a brinquebalé ses clients dans les rues défoncées de la ville, il rencontre au bureau de change une étonnante jeune fille allergique à l'argent. La nuit toujours, voilà que l'air se met à sentir l'iode, que l'eau coule salée des robinets et que des mouettes agressives attaquent les habitants... Et nos personnages se mettent en quête de la cause de ces inquiétantes anomalies.
L'imagination gouverne ce roman rythmé où l'absurde devient la norme. Car chez Kourkov, les histoires les plus irréalistes sont celles qui conduisent le mieux à méditer sur le sens de la vie.
Ignace Rough, grand magnat de la finance, invite à bord de son luxueux trois-mâts le Flamingo, une poignée de financiers experts qui forment un club très fermé sous le nom d'Union des Cinq. Ce groupe d'experts projette de se rendre maîtres du monde par un jeu spéculatif. L'ingénieur Corvin qui les accompagne, leur explique comment réussir ce beau coup. Il s'agira de profiter du passage dans notre ciel de la comète de Biéla pour déclencher un processus qui amènera la destruction de notre lune.
Paniquées, les populations seront alors à la merci de L'Union des Cinq... mais le cataclysme annoncé aura des conséquences bien inattendues.
Paru en 1925, ce court roman jubilatoire est à découvrir absolument.
Prix des lecteurs des Littératures européennes de Cognac.
"Étonnamment, j'ai eu le sentiment d'un livre à l'américaine, la mafia, la société engluée dans la débâcle politique, l'amour toujours présent." Sylvie Testud, Le Monde des livres
Petrograd. 1919. Journal affamé d'une jeune fille, Fénia, dépecée par la misère et les souffrances au lendemain de la révolution. Ses préoccupations - ses obsessions, plutôt : le système du rationnement, la structure économique du pays, certes.
Mais surtout, Fénia consigne avec une infinie minutie les innombrables malédictions (divisions, mesquineries...) que répand la faim sur sa famille. La Faim est le genre de livre qu'on vit... et qui donne la dalle.
Une mauvaise année s'achève pour Tolia. Plus de boulot, plus d'épouse. Il décide d'en finir avec l'existence en commanditant son propre assassinat, puisqu'à Kiev, par les temps qui courent, les tueurs à gages sont légion. L'engrenage mortel est lancé. Mais, plus vite que prévu, Tolia reprend goût à la vie et à l'amour. Hélas, le tueur est déjà à ses trousses et tient absolument à exécuter son contrat. Il est alors contraint d'engager un second homme de main pour se débarrasser du premier...
Côté cour, Sémion Ivanovitch Nevzorov partage son existence entre de vagues rêveries de midinette et quelques polissonneries avec sa maîtresse Knopka. Côté rue, la monotonie des semaines de bureau n'est guère rompue qu'à l'occasion des heures passées au cabaret du Pôle Nord. Ses camarades de beuverie n'accordent donc guère crédit aux propos d'une voyante qui prédit à notre homme un destin rempli d'aventures variées. C'est alors que la guerre puis la révolution russe se chargent de réaliser les prophéties en propulsant Nevzorov dans un tourbillon. Tolstoï utilise son talent fabuleux au service du plus échevelé des romans-feuilletons, et la vie du héros se confond bientôt avec une suite déchaînée de péripéties qui le mènent de Saint-Pétersbourg à Istanbul en passant par Odessa.
On croit en France que l'écriture n'est pas affaire de technique mais de révélation. Le Russe Chklovski s'évertue à prouver le contraire dans ce petit bréviaire à l'usage de ceux qui ne veulent pas écrire n'importe quoi n'importe comment. On y apprendra ainsi qu'il vaut mieux ne pas se hâter de devenir écrivain professionnel, comment on rédige un article, comment on développe une intrigue, compose un caractère, ou encore pourquoi il faut collectionner les mots.
En prenant des exemples d'auteurs indiscutables comme Dickens, Maupassant, Tchekhov ou Dostoïevski, il invite autant à réfléchir sur la pratique qu'à mettre en action des procédés à même de prémunir contre une médiocrité qui n'a pas de frontière.
On ne naît pas écrivain, on le devient, et jamais sans conseils avisés.
« J'obtins de mon père la permission de monter à cheval. Il fit confectionner pour moi un tchekmen de cosaque et me fit don de son Alkide. De ce jour, je fus le compagnon obligé de mon père dans ses promenades aux environs de la ville. Il tirait plaisir à m'apprendre à monter avec élégance, à me tenir fermement en selle et à manier adroitement mon cheval.
Il disait que j'étais à l'image vivante de ses jeunes années et que j'eusse été soutien de sa vieillesse et l'honneur de son nom si seulement j'étais née garçon ! » À 23 ans, Nadejda Dourova profite du passage dans sa ville d'un régiment pour suivre sa vocation : elle se coupe les cheveux, se travestit en cosaque et rejoint l'armée du tsar. À la suite d'un haut fait d'armes, Alexandre Ier, qui a appris son secret, la convoque...
Le tsar Alexandre se rend en Angleterre où il observeles merveilles de l'industrie florissante de ce royaume etreçoit moult présents que son fidèle serviteur le cosaque Platov n'a de cesse de dénigrer. L'un d'entre eux pourtantles stupéfie : une puce dansante entièrement mécanique.
Les orfèvres anglais sont-ils à ce point supérieurs à ceux de l'empire du tsar ? Il en va de l'honneur des plus doués des artisans russes, dont parmi eux le Gaucher bigle de Toula.
Présenté par un narrateur narquois qui ne semble pas tout comprendre aux événements, à mi-chemin entre légende populaire et conte satirique, Le Gaucher témoigne avec malice et humour des rapports de la Russie avec l'Ouest.
L'histoire des Pussy Riot raconté de l'intérieur, de la création du groupe en 2011 jusqu'à l'emprisonnement de ses membres en passant par leurs actions depuis leur libération. Le récit de leurs combats contre la domination masculine et le caractère réactionnaire de l'Etat sous Poutine est l'occasion d'un portrait sans concession de la société russe contemporaine.
En URSS, le "retoucheur" effaçait les ennemis en disgrâce des photographies officielles. Mais quand la retouche précède l'exécution, le retoucheur n'a plus qu'à "s'effacer" pour ne pas, à son tour, être "rectifié"... Un thriller mystique qui illustre les manipulations du régime mafieux de Vladimir Poutine.
Ce beau livre illustré de photographies et dessins a été écrit par une seule personne, mais il a deux auteurs : l'essayiste Grigori Tchkhartichvili et son alter ego, le romancier Boris Akounine.
Dans ce livre, les morts peuplent autant les villes que les vivants, par leur nombre comme par leur présence silencieuse. C'est particulièrement vrai pour les villes anciennes, Rome ou Jérusalem. Dans les cimetières, le temps devient palpable, le passé est à portée de main, l'imagination s'envole lorsque le promeneur déchiffre les épitaphes des monuments funéraires.
Avec beaucoup d'humour et un plaisir évident, Boris Akounine nous emmène en promenade dans six nécropoles anciennes, de Moscou (Donskoï) à Paris (Père Lachaise), de Londres (Highgate) à New York (Green Wood), en passant par Jérusalem (Mont des oliviers) et Yokohama (Cimetière étranger). Dans chaque cimetière, Grigori Tchkhartichvili décrit les lieux et en relève les curiosités, tandis que Boris Akounine nous épouvante délicieusement avec des histoires de fantômes, de trésors cachés et de mystères inavouables, qui s'incarnent dans des figures historiques telles que la cruelle Saltytchikha, qui n'avait rien à envier au marquis de Sade, un Karl Marx transformé en vampire ou l'écrivain Oscar Wilde.
1914. La vie du tsar est menacée. Eraste Fandorine est chargé de capturer le révolutionnaire Ivan Ivanovitch Ivantsov pour le mettre hors d'état de nuire. Il découvre vite que l'homme, surnommé Ulysse, s'est réfugié à Bakou. Bakou, la ville noire, la ville la plus riche de l'Empire russe, aux mains de quelques magnats du pétrole de toutes nationalités (des Russes, des Arméniens, des Géorgiens, des Azéris...). En cette veille de Première Guerre mondiale, Bakou constitue aussi un nid d'espions particulièrement actifs. La femme de Fandorine, la comédienne Elisa Altaïrskaïa-Lointaine - rebaptisée Claire Delune - est également dans la ville pour un tournage. Mais la coïncidence n'enchante guère l'enquêteur, qui n'aspire qu'à reprendre sa liberté...
Première édition française d'un manifeste essentiel de l'art moderne écrit par l'écrivain, poète et journaliste russe Ilya Ehrenbourg en 1921, caractérisé par le soin apporté à sa mise en page autant que par le regard singulier porté par son auteur sur le cours de l'art de son temps et l'espoir d'une union entre les créateurs du monde entier, livrant une réflexion originale sur les rapports entre art et politique.
Rédigé en Belgique à l'automne 1921 et publié à Berlin au début de 1922, Et pourtant elle tourne vise à jeter un pont entre artistes russes et européens après la rupture de la guerre et de la révolution. Son auteur, Ilya Ehrenbourg, est alors connu comme poète. Exilé politique, il a vécu à Paris de 1908 à 1917 et fréquenté la plupart des artistes modernistes. Proche de Picasso, Apollinaire, Cendrars, Léger, Max Jacob, Rivera, il s'est lié à son retour en Russie aux poètes, peintres et metteurs en scène les plus novateurs. Manifeste essentiel de l'art moderne, Et pourtant elle tourne est l'antécédent direct de la revue Vechtch/ Gegenstand / Objet, qu'Ehrenbourg coédite à Berlin avec El Lissitsky en 1922. Ouvert à toutes les tendances de l'art moderne, l'ouvrage livre une réflexion originale sur les rapports entre art et politique. Il est proposé pour la première fois au lecteur dans une édition française.
Sept romans en un, où se croisent une petite fille morte, un assassin devenu apôtre, un chaman samoyède, un Lénine aphasique, une croisade d'orphelins, une folle en Christ, un prêtre collectionneur de comptines, un peintre passionné du Grand Nord et un narrateur épileptique.
Soyez comme les enfants est un roman initiatique, singulier autant que monumental, qui se lit comme un roman policier - un roman policier de Dostoïevski par exemple. Singulier par sa densité, son mépris des conventions littéraires, sa puissance narrative, alliée à une surprenante fantaisie. Monumental par son étrangeté même, non pas statue érigée par quelque autorité officielle, mais bric-à-brac gigantesque, amoncellement d'histoires entassées l'une sur l'autre dans l'espoir peut-être d'atteindre le ciel, monstrueux échafaudage menaçant semble-t-il à chaque instant de s'écrouler ou de s'embraser, et prenant forme pourtant, et pesant de tout son poids sur la conscience du lecteur.
Enlevé au détour d'un chemin par une femme au charme ensorceleur, Nicholas se voit imposer un effroyable marché : il devra devenir le précepteur d'une fillette de la bonne société et se tenir prêt à obéir à tous les ordres émanant de son ravisseur en jupons, en échange de quoi ses enfants auront la vie sauve. Contraint d'accepter, Fandorine est entraîné au coeur d'une terrible machination, à laquelle font étrangement écho les sombres agissements dont est victime le héros de son jeu vidéo, son ancêtre Danila Fondorine. Et si la tragédie des origines de la famille Fandorine se jouait à travers les deux hommes ? Boris Akounine mêle avec brio deux histoires distinctes : l'une située dans la Russie contemporaine, gangrenée par la corruption, l'autre se déroulant au XVIIIe siècle, sur fond de complots de cour.
Le détective Eraste Fandorine dans le rôle de l'amoureux éconduit.
Russie, 1911. A la suite d'un quiproquo, la veuve de Tchekhov charge Eraste Fandorine de découvrir ce qui terrorise l'une de ses amies, la comédienne Eliza Lointaine-Altaïrskaï. Pour les besoins de son enquête, le détective assiste à la représentation d'une pièce dans laquelle la jeune femme interprète le rôle principal. Dès que l'actrice apparaît sur scène, Fandorine est stupéfait par sa ressemblance avec son premier amour, Liza, disparue tragiquement. Il tombe immédiatement sous son charme.
Malheureusement, l'envoûtante Eliza semble victime d'une malédiction : tous les hommes qui la courtisent finissent par trouver la mort. C'est pourquoi elle décide d'éviter Fandorine. Blessé dans son amour-propre, le détective saura-t-il faire preuve du discernement nécessaire pour résoudre ce mystère?
De sa plume enlevée, Boris Akounine tisse une intrigue à la Agatha Christie, et nous livre un roman intelligent et léger, qui illustre encore une fois son immense virtuosité.
En l'an 1655, le directeur d'une troupe de théâtre ambulante, jacques de sertan, un français aux origines bretonnes (ses carnets secrets, retrouvés en sibérie par un universitaire russe, sont rédigés en breton!) échoué en russie à la suite de maints déboires, est engagé par le patriarche nikon, inspirateur de la grande réforme de l'eglise russe, pour monter une pièce de théâtre retraçant la vie du christ.
A trois conditions, cependant: la pièce doit être vraie, sertan ne doit recourir à aucun comédien professionnel, et jusqu'au jour de la représentation le rôle du christ ne sera tenu par personne.
Si le français se rend bien compte qu'il tient là l'oeuvre de sa vie, il s'aperçoit aussi très vite que cette oeuvre tend à le dépasser, que les desseins du patriarche ne sont rien moins qu'apocalyptiques, et que la parole du christ produit d'étranges effets sur les paysans illettrés qu'il a enrôlés comme comédiens, et qui bientôt répètent leurs rôles avec ferveur.
Ce que deviendront le patriarche nikon, jacques de sertan et ses étranges comédiens, le lecteur le découvrira dans ce récit inouï, oú l'humain et le divin se mêlent pour le plus grand malheur des hommes, ou oú la vie finit par prendre couleur de théâtre - histoire de répétitions, certes, mais aussi répétitions obstinées de l'histoire. mais il y découvrira aussi, entre autres enseignements, que chercher à comprendre dieu permet d'aimer barabbas, que perdre son nez conduit parfois à combattre le diable, et que les lettres d'amour, comme les contes arabes, peuvent avantageusement remplacer le papier-monnaie.