« Le 18 août 2021, j'ai passé la nuit au musée Anne Frank, dans l'Annexe. Anne Frank, que tout le monde connaît tellement qu'il n'en sait pas grand-chose. Comment l'appeler, son célèbre journal, que tous les écoliers ont lu et dont aucun adulte ne se souvient vraiment ? Est-ce un témoignage, un testament, une oeuvre ? Celle d'une jeune fille, qui n'aura pour tout voyage qu'un escalier à monter et à descendre, moins d'une quarantaine de mètres carrés à arpenter, sept cent soixante jours durant. La nuit, je l'imaginais semblable à un recueillement, à un silence. J'imaginais la nuit propice à accueillir l'absence d'Anne Frank. Mais je me suis trompée. La nuit s'est habitée, éclairée de reflets ; au coeur de l'Annexe, une urgence se tenait tapie encore, à retrouver. »Lola Lafon fait résonner la voix de l'adolescente fauchée par l'Histoire avec les fantômes de son propre passé. Bouleversant. Clémentine Goldszal, Elle.Un récit délicat et personnel. Virginie Bloch-Lainé, Libération.Prix Décembre Prix Les Inrockuptibles.
La philosophie politique et la psychanalyse ont en partage un problème essentiel à la vie des hommes et des sociétés, ce mécontentement sourd qui gangrène leur existence. Certes, l'objet de l'analyse reste la quête des origines, la compréhension de l'être intime, de ses manquements, de ses troubles et de ses désirs. Seulement il existe ce moment où savoir ne suffit pas à guérir, à calmer, à apaiser. Pour cela, il faut dépasser la peine, la colère, le deuil, le renoncement et, de façon plus exemplaire, le ressentiment, cette amertume qui peut avoir notre peau alors même que nous pourrions découvrir son goût subtil et libérateur.L'aventure démocratique propose elle aussi la confrontation avec la rumination victimaire. La question du bon gouvernement peut s'effacer devant celle-ci:que faire, à quelque niveau que ce soit, institutionnel ou non, pour que cette entité démocratique sache endiguer la pulsion ressentimiste, la seule à pouvoir menacer sa durabilité? Nous voilà, individus et État de droit, devant un même défi:diagnostiquer le ressentiment, sa force sombre, et résister à la tentation d'en faire le moteur des histoires individuelles et collectives.
Le 7 janvier 2015, la rédaction de Charlie Hebdo est la cible d'une fusillade meurtrière. Un procès retentissant se tient cinq ans plus tard. À la barre, Richard Malka livre une plaidoirie historique et se fait l'avocat de la liberté. Chaque mot pèse. Chaque mot frappe. Ou apporte la douceur, évoquant les noms des disparus, des amis, leurs plumes, leurs pinceaux, leur distance ironique et tendre. Bien plus qu'une plaidoirie, Le Droit d'emmerder Dieu est un éloge de la vie libre et éclairée.
«Nous ne savons pas ce qui nous arrive et c'est précisément ce qui nous arrive», écrit José Ortega y Gasset.Tant de certitudes ont été balayées ! Comment naviguer dans un océan d'incertitude ? Comment comprendre l'histoire que nous vivons ? Comment admettre enfin que, en dégradant l'écologie de notre planète, nous dégradons nos vies et nos sociétés ? Comment appréhender le monde qui se transforme de crise en crise ? Comment concevoir l'aventure inouïe de notre humanité ? Est-ce une course à la mort ou à la métamorphose ?Serait-ce à la fois l'un et l'autre ?Réveillons-nous !E. M.
Pourquoi Colette ? Un grand écrivain, c'est aussi un écrivain qui crée des mythes, qui renouvelle notre mythologie. « Créer un poncif, c'est le génie », disait Baudelaire. Colette a créé quatre mythes : Claudine; Sido, Gigi, et Colette, elle-même, grand écrivain national, monstre sacré. Admirée par Simone de Beauvoir, pionnière de la transgression et de la provocation, elle fait souffler dans ses romans ce vent de liberté qui nous manque tant aujourd'hui. Antoine Compagnon décline toutes les facettes de Colette, des plus connues ou plus secrètes. De Claudine, sa première héroïne, dont son mari, Willy, s'appropria la paternité, signant de son propre nom les textes de son épouse et récoltant le succès et l'argent à sa place. Sido, inspirée par sa propre mère, sans doute sa plus belle invention romanesque. En passant par Gigi, son double littéraire charmante, légère, heureuse en amour et en mariage - à l'opposé de sa créatrice qui fuira « l'homme, souvent méchant » et trouvera refuge auprès des femmes. De sa Bourgogne natale à la présidence de l'académie Goncourt - elle qui n'avait aucun diplôme -, Colette ne fut jamais là où on l'attendait et emmena la littérature là où personne d'autre n'avait osé aller. Plus accessible que Proust, plus moderne que Gide, Claudel ou Valéry, Colette réussit la prouesse d'être à la fois lue dans les écoles et d'avoir conçu une oeuvre toujours aussi sulfureuse. Lire Colette aujourd'hui, c'est embrasser le XXe siècle dans toute son extravagance, grâce à un style qui n'a pas pris une ride.
Puisque l'époque nous assigne à résidence, prenons la fuite et passons l'été à bord du bateau ivre de la poésie : Arthur Rimbaud.
Sylvain Tesson s'attaque au mythe Rimbaud en le sortant de la kermesse biographique et en le dépoussiérant de ses vieux habits de jeune monstre de la poésie : Rimbaud anarchiste, communard, voyou, punk, beatnik, sauvage, avant-gardiste, moderne, trouvère, futuriste... Certes mais surtout Rimbaud, poète.
A ses côté, Sylvain Tesson marche et traverse les paysages réels ou imaginaires suivant le cap tracé par René Char : « Rimbaud poète, cela suffit et cela est infini » A la vitesse de l'éclair mais aussi avec humour et lucidité, des Ardennes au désert africain Sylvain Tesson en voyageur aventureux perce à jour le voyant monstrueux qui révolutionna la poésie et qui n'avait qu'un ennemi : l'ennui.
Un été particulièrement incandescent où la route est une illumination.
Un été avec Rimbaud est le 9 e titre de la collection.
«Je me souviens du moins d'une grande fille magnifique qui avait dansé tout l'après-midi. Elle portait un collier de jasmin sur sa robe bleue collante, que la sueur mouillait depuis les reins jusqu'aux jambes. Elle riait en dansant et renversait la tête. Quand elle passait près des tables, elle laissait après elle une odeur mêlée de fleurs et de chair.»
Parce qu'on ne naît pas homme, on le devient.
Adapté du podcast phénomène Les Couilles sur la table, ce livre est une synthèse indispensable et passionnante de ce que l'on sait sur la virilité, les masculinités et les hommes.
Un livre à offrir à toutes celles et ceux qui se posent des questions sur eux-mêmes. Et à celles et ceux qui ne s'en posent pas encore.
Nous ne pouvons plus le nier, il nous faut faire désormais face à la catastrophe climatique. N'est-il pas temps d'entrer en résistance contre les logiques de destruction massive, frénétique, de nos écosystèmes ? Dans ce "Petit manuel", revu et augmenté, sans chercher à apporter de réponses définitives, Cyril Dion propose de nombreuses pistes d'actions. Plus encore, il nous invite à renouer avec notre élan vital, à mener une existence où chaque chose que nous faisons, depuis notre métier, jusqu'aux tâches les plus quotidiennes, participe à construire le monde dans lequel nous voulons vivre. Nouvelle édition revue et augmentée.
Qu'en est-il de «l'art d'être français» ? Et quelle figure d'écrivain serait la mieux à même d'incarner ce génie singulier ? Une institution littéraire réputée, saisie par les plus hautes instances politiques, aurait, dit-on, tenté de répondre à cette question, en soumettant le sujet au vote auprès de ses membres les plus éminents. Résultat : Stendhal, premier sur la liste, assez loin devant Hugo.Alarmé par cette rumeur, et conscient qu'un tel choix aurait un enjeu stratégique non seulement littéraire mais proprement éthique, Régis Debray examine de près les mérites respectifs des deux candidats à la fonction suprême. Sa conclusion : Hugo d'abord, Hugo toujours.Simple question de goût ? Non, car il en va de la vocation d'un peuple, qui regarde notre présent mais plus encore notre avenir.
L'Iliade est le récit de la guerre de Troie. L'Odyssée raconte le retour d'Ulysse en son royaume d'Ithaque. L'un décrit la guerre, l'autre la restauration de l'ordre. Tous deux dessinent les contours de la condition humaine. À Troie, c'est la ruée des masses enragées, manipulées par les dieux. Dans l'Odyssée on découvre Ulysse, circulant entre les îles, et découvrant soudain la possibilité d'échapper à la prédestination. Entre les deux poèmes se joue ainsi une très violente oscillation : malédiction de la guerre ici, possibilité d'une île là-bas, temps des héros de côté là, aventure intérieure de ce côté ci.
Ces textes ont cristallisé des mythes qui se répandaient par le truchement des aèdes dans les populations des royaumes mycéniens et de la Grèce archaïque il y a 2500 ans. Ils nous semblent étranges, parfois monstrueux. Ils sont peuplés de créatures hideuses, de magiciennes belles comme la mort, d'armées en déroute, d'amis intransigeants, d'épouses sacrificielles et de guerriers furieux. Les tempêtes se lèvent, les murailles s'écroulent, les dieux font l'amour, les reines sanglotent, les soldats sèchent leurs larmes sur des tuniques en sang, les hommes s'étripent et une scène tendre interrompt le massacre pour nous rappeler que les caresses arrêtent la vengeance.
Préparons-nous : nous passerons des fleuves et des champs de bataille, nous serons jetés dans la mêlée, conviés à l'assemblée des dieux, nous essuierons des tempêtes et des averses de lumière, nous serons nimbés de brumes, pénétrerons dans des alcôves, visiterons des îles, prendrons pied sur des récifs. Parfois, des hommes mordront la poussière, à mort. D'autres seront sauvés. Toujours les dieux veilleront. Et toujours le soleil ruissellera et révèlera la beauté mêlée à la tragédie. Des hommes se démèneront pour mener leurs entreprises mais derrière chacun d'eux, un dieu veillera et jouera son jeu. L'Homme sera-t-il libre de ses choix ou devra-t-il obéir à son destin ? Est-il un pauvre pion ou une créature souveraine ?
Les poèmes auront pour décor des îles, des caps et des royaumes dont un géographe, Victor Bérard, effectua dans les années 1920 une très précise localisation. La Mare Nostrum est ce haut lieu d'où a jailli l'une des sources de notre Europe, qui est la fille d'Athènes autant que de Jérusalem.
Mais une question nous taraude. D'où viennent exactement ces chants, surgis des profondeurs, explosant dans l'éternité ? Et pourquoi conservent-ils à nos oreilles cette incomparable familiarité ? Comment expliquer qu'un récit de 2500 ans d'âge, résonne à nos oreilles avec un lustre neuf, un pétillement aussi frais que le ressac d'une calanque ? Pourquoi ces vers paraissent-ils avoir été écrits pas plus tard qu'aujourd'hui, par un très vieux poète à la jeunesse immortelle, pour nous apprendre de quoi seront fait nos lendemains ? En termes moins lyriques (Homère est le seul maître en la matière) d'où provient la fraîcheur de ce texte ? Pourquoi ces dieux et ces héros semblent malgré la terreur qu'ils inspirent et le mystère qui les nimbe, des êtres si amicaux ?
«Limonov n'est pas un personnage de fiction. Il existe. Je le connais. Il a été voyou en Ukraine ; idole de l'underground soviétique sous Brejnev ; clochard, puis valet de chambre d'un milliardaire à Manhattan ; écrivain branché à Paris ; soldat perdu dans les guerres des Balkans ; et maintenant, dans l'immense bordel de l'après-communisme en Russie, vieux chef charismatique d'un parti de jeunes desperados. Lui-même se voit comme un héros, on peut le considérer comme un salaud : je suspends pour ma part mon jugement.» Emmanuel Carrère.
«Tu es entrée, par hasard, dans une vie dont je n'étais pas fier, et de ce jour-là quelque chose a commencé de changer. J'ai mieux respiré, j'ai détesté moins de choses, j'ai admiré librement ce qui méritait de l'être. Avant toi, hors de toi, je n'adhérais à rien. Cette force, dont tu te moquais quelquefois, n'a jamais été qu'une force solitaire, une force de refus. Avec toi, j'ai accepté plus de choses. J'ai appris à vivre. C'est pour cela sans doute qu'il s'est toujours mêlé à mon amour une gratitude immense.» Pendant quinze ans, Albert Camus et Maria Casarès échangent des lettres où jaillit toute l'intensité de leur amour. Entre la déchirure des séparations et les élans créateurs, cette correspondance met en lumière l'intimité de deux monstres sacrés au sommet de leur art.
Dans «Les Cercueils de zinc», Svetlana Alexievitch avait osé violer en 1989 un des derniers tabous de l'ex-URSS : elle dénonçait le mythe de la guerre d'Afghanistan, des guerriers libérateurs. La vérité n'est jamais bonne à dire, «Les Cercueils de zinc» valut à son auteur un procès pour "calomnie". Reste que sans ce livre on ne saurait rien de la guerre des Soviétiques en Afghanistan ni, vues de l'intérieur, des dernières années de l'URSS. Un témoignage capital du Prix Nobel de littérature 2015, dans une édition revue par l'auteur.
19 novembre 1957Cher Monsieur Germain,J'ai laissé s'éteindre un peu le bruit qui m'a entouré tous ces jours-ci avant de venir vous parler un peu de tout mon coeur. On vient de me faire un bien trop grand honneur, que je n'ai ni recherché ni sollicité. Mais quand j'ai appris la nouvelle, ma première pensée, après ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j'étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé. (...)Je vous embrasse, de toutes mes forces.Albert CamusAlors qu'il vient de recevoir le prix Nobel de littérature, Albert Camus écrit à son ancien instituteur à Alger, celui sans qui «rien de tout cela ne serait arrivé», toute sa reconnaissance. L'ensemble de la correspondance entre les deux hommes et un extrait du Premier homme où apparaît le personnage de l'instituteur M. Bernard sont ici réunis. Une édition en forme d'hommage à ce lien magnifique de gratitude et de tendresse.
Avec son légendaire talent de conteur, Michel Butor raconte l'histoire de la littérature française comme vous ne l'avez jamais lue : La Fontaine et Racine, Perrault et Chateaubriand, Proust et Céline, mais aussi la naissance du roman, l'Orient et ses fées, l'utopie, les métamorphoses de l'alexandrin ou encore les poètes de la Résistance...Au fil d'échanges vivants et malicieux, cette figure majeure du Nouveau Roman resitue chaque auteur dans son époque, explique le mouvement qu'il a incarné.Chez Butor, tout pétille. Il nous invite ici à une véritable fête de l'esprit.
Nouvelle édition en 2004
Arthur Lochmann a délaissé ses études de droit et de philosophie pour devenir charpentier. En apprenant le métier, il a découvert des gestes, des techniques et une pensée de la matière qui ont transformé son rapport au monde. Ce récit d'apprentissage plein d'humilité entremêle souvenirs de chantiers et réflexions sur le corps, le savoir et le travail aujourd'hui. Avec une langue limpide et élégante, l'auteur montre comment la pratique de cet artisanat lui a donné des clés précieuses pour s'orienter dans une époque frénétique. Parce qu'apporter du soin à son travail, c'est déjà donner du sens à son action ; qu'apprendre et transmettre des savoirs anciens, c'est préserver un bien commun ; et que bien bâtir, c'est s'inscrire dans le temps long : la charpente est une éthique pour notre modernité.
« Ma Véronique, tout ça est bien excitant, New York très très beau. Je mène une vie de chien savant, je savoure le succès avec force whiskies, mais la ville est drôlement belle. Tu verras ça, c'est fou. Je ne peux pas te dire si je suis heureuse ou pas, je n'ai pas le temps de le savoir. » 1954. Après la publication de Bonjour tristesse, Françoise Sagan, dix-neuf ans, découvre le succès, le milieu littéraire et l'Amérique lors de la tournée mondiale organisée autour de son livre. À son amie chère, Véronique, elle écrit ses émois, ses voyages et ses rencontres à coups de lettres pétillantes et de télégrammes espiègles.L'écrivaine rédige ces missives avec la délicatesse, le ton lapidaire et l'autodérision qui signent son style. Elle.Un bonheur de lecture qui nous replonge dans toute une époque et révèle une facette très attachante du mythe. Version Femina.Ces lettres ont le charme intense des premières fois et des amitiés absolues. Page des libraires.PRÉFACE D'OLIVIA DE LAMBERTERIE.
«Ils m'ont rien laissé... pas un mouchoir, pas une chaise, pas un manuscrit», se plaignait Louis-Ferdinand Céline. En 1944, l'écrivain fuit vers l'Allemagne. Des manuscrits disparaissent de son appartement, parmi lesquels plusieurs inédits. Au début des années 1980, Jean-Pierre Thibaudat entre en possession d'une caisse, un mètre cube de papiers... de la main de Céline. Des documents de toute sorte, dont les mythiques manuscrits. Une condition était posée : ne rien divulguer avant la mort de Lucette Destouches, veuve de Céline.
Au début du mois d'août 2021, leur découverte est rendue publique à la suite d'un imbroglio judiciaire. Le dépositaire accidentel d'archives de l'un des plus grands mythes littéraires du XXe siècle livre ici la véritable histoire de ce trésor retrouvé.
« Contre la société, contre les préjugés d'un temps pas si lointain, elle a pris tous les risques » (Dinaw Mengestu).
Dédié à la fille qu'elle n'a jamais eue, cet ouvrage est une succession de courts textes décrivant les souvenirs qui ont façonné la vie exceptionnelle de Maya Angelou (1928-2014). Féministe avant l'heure, après une enfance et une adolescence marquées par la violence, elle fréquentera le milieu intellectuel noir-américain et défendra sans relâche la condition des femmes noires. C'est grâce à l'écrivain James Baldwin qu'elle se mettra à écrire, après la mort de Martin Luther King, pour devenir l'auteure que l'on connaît aujourd'hui.
Un récit captivant, dans lequel elle partage ses combats et les épreuves qui ont forgé son caractère dans la compassion et le courage.