Dans nos conversations ou nos écrits, les figures de style construisent notre langue. Elles sont toutes ici expliquées, commentées et classées.
Chaque figure est illustrée d'un ou plusieurs exemples empruntés à toutes les époques et à tous les niveaux de langue - de Racine à San Antonio. Cette variété rend le propos accessible à tous et la lecture du livre attrayante, souvent drôle.
Pour faciliter la consultation, l'ouvrage comporte un dictionnaire de toutes les figures traitées et un répertoire (par auteurs) de toutes les citations retenues pour les illustrer.
L'auteur entreprend ici un réexamen systématique de la comédie shakespearienne, convaincu qu'il est que cette dernière a traditionnellement fait l'objet de jugements erronés.
Dans cette perspective, il défend l'idée qu'avec ses dernières pièces - périclès, cymbeline, le conte d'hiver et la tempête - les quatre " romances " ou tragi-comédies romanesques, dans lesquelles intervient le surnaturel - shakespeare atteint au point culminant de son oeuvre.
Dans une écriture imagée et érudite, constamment surprenante, le grand critique met en lumière les éléments de structure dramatique et les images qui, de façon récurrente, gouvernent 1a construction de ces pièces : tempête en mer, jumeaux, ou encore travestissement de l'héroïne en garçon, retraite en forêt, énigme du père.
La littérature, au XIXe siècle, avait confié au roman l'essentiel de son entreprise de savoir.
Ce livre construit l'histoire du genre qui en a pris le relais au long du XXe siècle: de Péguy à Benjamin, de Thibaudet à Bataille, les écrivains ont demandé à l'essai d'occuper l'espace que les discours savants disputaient désormais à la littérature. Cinq moments, souvent des duels, scandent cette histoire. Bergson (contre Benda), Gide (en nouveau Montaigne), Breton, Sartre (contre Bataille) ou Barthes en sont les héros privilégiés; ils ont maintenu un équilibre fragile, celui de " l'engagement de la pensée dans la forme ".
Notre présent vient après coup: les ressorts ont momentanément cédé, l'essayisme "d'utilité publique" se défait, pris entre des exigences impossibles à concilier. Ce livre date une question, situe des positions dans la culture et met au jour tout un corpus essentiel à notre mémoire littéraire. Le récit qu'il propose est mené en sympathie avec un objet mobile, impatient, séduisant; il ressaisit nombre de chefs-d'oeuvre, mais dévoile aussi des anachronismes qui incarnent toute la difficulté de la situation moderne de la littérature.
Odön von horvath (1901-1938) est un auteur majeur à (re)découvrir.
Ecrivain de langue allemande au passeport hongrois, d'origine à la fois magyare, croate, allemande et tchèque, il témoigna du métissage culturel caractérisant l'europe centrale et combattit sa vie durant toute forme de nationalisme. " chroniqueur " de son temps, selon sa propre formule, il traversa la république de weimar, vécut la montée du nazisme, s'exila, tout en posant un regard acéré et ironique sur son époque.
D'oú une oeuvre captivante, comprenant aussi bien des contes et des romans que des pièces de théâtre. horvâah a su en particulier renouveler la tradition du théâtre populaire pour en développer une veine critique, qui n'a rien perdu de son actualité.
Relativement peu connue sur la scène internationale, Toni Cade Bambara (1939-1995) est pourtant une figure centrale du monde littéraire afro-américain d'après les mouvements de lutte pour les droits civiques.
Aussi fougueuse qu'intègre, cette militante convaincue n'a cessé, par son oeuvre littéraire, de tester les limites du langage dans sa quête radicale de vérité et de justice. Entre rire et désespoir, rhétorique enflammée et silence méditatif, son oeuvre dit la lutte incessante d'un être tour à tour habité par le doute et la conviction que " les amants comme les combattants ne sont jamais vaincus ".
" Faire mouche et frapper les esprits " - la vue, l'ouïe, " faire vibrer jusqu'aux membranes du cerveau " : tel est le projet de " la prose à sensations " de Paul West.
Excessive et poétique, elle tend vers la musique sans renoncer au sens, séduite par l'immatériel mais désireuse de laisser une trace. Les contradictions immanentes à la condition absurde de l'homme sont explorées au fil des variations continues des voix qui s'élèvent de l'oeuvre écrit, retentissantes, mélodieuses ou discordantes.
Le théâtre peut être observé avec deux regards très différents : en considérant les formes du draine, ou la rie sur scène.
Le présent ouvrage adopte successivement ces deux points de vue. Il se propose d'abord d'interroger la nature du drame, en se demandant ce qu'est exactement une action dramatique - qui ne se réduit, ni à des gestes, ni à des discours. Au-delà du théâtre, il questionne par la les racines métaphysiques de toute dramatisation de nos vies et de nos destins. Le livre analyse ensuite l'existence sur la scène.
Il aborde l'essence du jeu théâtral, l'émergence du métier de comédien, ainsi que la question du plaisir pris au spectacle, et de sa valeur. L'interprétation sous-jacente consiste à supposer que la faveur actuelle du jeu, de la scène, de la figure de l'acteur est un des signes de notre entrée dans une nouvelle époque, d'une sorte de mutation de l'expérience du monde. Pour mener ces différentes analyses, l'auteur mobilise autant son métier de philosophe que sa connaissance personnelle des arts de la scène.
On trouvera dans ces réflexions un alliage inhabituel de philosophie rigoureuse et de sens pratique du théâtre.
Plus que ses livres achevés, ces notes montrent le côté « abrupt » et la profonde originalité de la pensée de Merleau-Ponty, qui conduit ses auditeurs vers ce qui fait le socle de sa phénoménologie : la vie perceptive. Le livre s'organise comme suit :
I. L'institution dans l'histoire personnelle et publique (la notion d'institution est envisagée dans des domaines divers : le sentiment, l'art, les mathématiques, la connaissance d'autres cultures).
II. Le problème de la passivité : le sommeil, l'inconscient, la mémoire (la passivité n'est pas un état, mais une modalité de notre relation au monde ; non pas le contraire de l'activité, mais son envers).
Appendice : Trois notes sur l'inconscient freudien et Notes de lecture sur Proust et sur Freud Nombreuses références bibliographiques, abondamment commentées, des auteurs cités par Merleau Ponty (Rabelais, Freud, Lucien Febvre, Sartre, Lévi-Strauss...).
La carrière de kate chopin (1850-1904) fut brève mais fulgurante.
L'oeuvre lumineuse de cette femme libre de saint louis est traversée d'influences multiples. comme son maître maupassant, elle a su "jeter un regard lucide sur la vie" ; imprégnée d'emerson, elle apprit avec lui à "s'affranchir de la tradition". rompant avec les courants littéraires de son époque, ses romans et nouvelles, ciselés et musicaux, donnent forme poétique à ses "impressions". son chef-d'oeuvre, l'eveil (1899), histoire d'adultère au féminin, fit scandale.
Ce fut aussi son chant du cygne.
Dernière oeuvre de Mallarmé, Un coup de dés jamais n'abolira le hasard est un " recommencement " de la poésie : le vers, le poème et le livre sont d'un seul geste remis en jeu.
Comment Mallarmé, poète profondément attaché à la tradition versifiée, a-t-il pu se porter aussi loin dans le sens des avant-gardes ? La réponse passe par une analyse des rapports complexes entre la " crise de vers " dont il prend conscience, la théorie du vers qu'il reformule et le regard qu'il porte sur les tentatives contemporaines. Convaincu de l'échec du vers-librisme, Mallarmé reconstruit le vers à partir du livre ; il le dispose sur l'espace articulé de la double page, réorganise la syntaxe par groupements et périodes, transforme en intervention critique le miroitement de l'allégorie.
A un ordre fondé sur la fiction du Nombre il prend le risque de substituer une invention " hors d'anciens calculs " se déployant sur l'horizon d'un hasard indépassable. C'est à la compréhension d'un tel projet et à la description du genre entièrement nouveau de poésie versifiée qui en résulte qu'est consacré ce livre.
L'ensemble des nouvelles de Guy Davenport constitue une sorte de "relecture" de la littérature passée par l'intermédiaire d'une écriture dont il n'existe aucun autre exemple, d'un style à la fois versatile et harmonieux.
Cet essai tente de faire connaître un auteur encore trop peu traduit en France et d'éclairer ce dédale érudit placé sous la tutelle d'Ezra Pound et de Kafka, de Montaigne et de Plutarque, ces "assemblages d'histoire et de fiction nécessaire", cette approche d'une utopie par le biais de l'érotisme.
Adulé par le public des années 60 qui s'attacha à la tonalité surréaliste et absurde de ses premiers écrits, Richard Brautigan nous a laissé une oeuvre originale.
Des expérimentations formelles de la fiction au bilan de sa propre vie, chaque livre est une incursion dans l'imaginaire et cultive l'esthétique de l'instant et du détail. Ni romans, ni nouvelles, ni poèmes, les " brautigans " sont des tourbillons d'images, des assemblages éphémères d'écrits, où l'humour le dispute à la noirceur.
Plus inspirée par Dostoïevski que par Faulkner, " auquel elle a l'élégance de ne pas ressembler du tout " (Gore Vodal), Carson McCullers dépeint dans son oeuvre un Sud des Etats-Unis oppressant.
Sous un soleil de plomb, des personnages en mal d'identité se croisent sans jamais se rencontrer. Souvent étiqueté " romancière de la solitude et de l'incomunicabilité ", McCullers manifeste, dans un style concis et efficace, une comparaison, infinie pour le genre humain sur lequel elle se penche avec une lucidité implacable.
" L'Amérique n'a jamais été aussi fictive qu'en ses débuts oubliés, du temps qu'elle était lune et Endymion son roi.
" Son histoire, à peine amorcée, bifurque en 1590, dans le jardin de Virginie. Six ans après la découverte émerveillée d'un monde dont le mathématicien Thomas Harriot se fera le scrutateur savant, la colonie de Roanoke disparaît mystérieusement aux regards de John White, artiste-peintre et gouverneur. Trente ans plus tard, la " plantation " de Plymouth imposera son décalque de modèles anciens sur une terre neuve.
Mais fonder l'Amérique sur la vision puritaine, c'est un peu comme confier la gestion de l'Eldorado au Père Goriot, préparer l'abaissement du songe en " rêve américain ". On n'aura, tout compte fait, droit qu'aux Etats-Unis.
Dans un récit composite qui se voudrait " lavis, aquarelles, aquarêves " et où se mêlent souvenirs, fiction et événements d'un lointain passé, La perte de l'Amérique fait de " la Colonie Perdue ", oubliée des chroniques, la métaphore centrale de cette élégie pour une Amérique évanouie, de ces lettres d'amour et d'adieu au continent du rêve.
Une langue baroque y cherche " des couleurs laissant voir le papier, des phrases pâles, une parole grise où se détacheraient la moindre des roseurs, la verdure la moins crue, le plus léger des fards, le bleu d'une échappée ".
Un homme, au rêve habitué, vient ici parler du rêve, qui est mort.
Bien que Francis Scott Fitzgerald demeuré aux yeux de beaucoup le chroniqueur de l'" Age du Jazz ", son écriture dépasse largement la peinture sociale ou l'évocation métaphorique de la mort du rêve américain.
Derrière l'insouciance de l'Amérique des Années folles, la fracture qu'il décèle en traduit une autre, plus fondamentale : celle de l'individu. Jouant des zones d'ombre, son esthétique traque l'indicible, interroge l'être, intensément, et, sans relâche, l'acte d'écriture.
Sous les dehors de la satire sociale, l'oeuvre de John Cheever, chez qui l'hédonisme homosexuel rencontre la culture puritaine, se révèle en fait profondément romantique.
Conjuguant lyrisme et ironie, réalisme et onirisme, celui que la critique surnomma le " Tchekhov des banlieues " dessine ainsi, outre une vaste comédie humaine, un espace symbolique tout en contrastes où sont mises en scène les discordes du moi et où se joue un conflit intérieur jamais véritablement apaisé.
" Les porteurs d'ombre travaillent dans l'infra-mince " : telle est l'énigmatique définition que Marcel Duchamp donnait de l'activité artistique.
L'ombre dont il est ici question est de celles qui s'opposent aux Lumières, c'est-à-dire qu'elle tombe depuis la pointe de l'archaïque, et l'art qui est pris dans son cône s'affranchit du cadre de la modernité. Les porteurs d'ombre - entendons les artistes - ne sont pas des fabricants ou des producteurs (qui feraient de l'art), mais des travailleurs qui font dans l'art (comme on fait dans la dentelle).
Cette immersion, qui définit plaisamment leur activité, invalide du même coup une approche strictement esthétique de ses résultats et renvoie bien plutôt à l'anthropologie, en tant qu'elle s'intéresse aux pratiques symboliques. L'infra-mince est un néologisme qui relève d'un humour typiquement nominaliste : il suggère que l'art construit sa poétique à partir de la coupure entre les mots et les choses.
Mais la définition a surtout valeur d'explication : elle nous dit que l'ombre et l'infra-mince sont portés par le même pli (on travaille dans l'infra-mince parce qu'on est porteur d'ombre et vice-versa). Catherine Perret nomme ce pli mimésis. En s'engageant ici dans une généalogie de la mimésis moderne depuis Vélazquez et Descartes jusqu'à l'art contemporain, elle dessine les contours des ombres que l'art fait tomber sur l'époque au moment où ses objets perdent leur aura.
Auteur canonique, Schiller n'a pas échappé à un certain oubli.
Pourtant, lire son oeuvre aujourd'hui est bien autre chose qu'un geste de pieuse redécouverte. C'est apprendre à connaître une source vive de la culture européenne. Avec une ardeur intellectuelle et artistique sans exemple, Schiller a repris à son compte les grandes questions d'une époque foisonnante, les a repensées et transcendées. Son théâtre de jeunesse est le lieu privilégié de cette vaste entreprise.
Révolutionnaire et visionnaire, lue et commentée par les grands esprits des XIX et XXe siècles, l'oeuvre de Schiller reste d'une grande fécondité.
Thomas Wolfe, styliste susceptible et marginal, courtisait le désastre dans des romans-fleuves qui n'obéissaient à aucune règle.
Une étroite proximité au héros de L'Ange exilé donne de lui l'image de cet adolescent perdu qui arbore sa solitude comme un signe de valeur. Mais l'ensemble de ses proses autoréférentielles et lyriques témoigne avec sincérité du développement d'un homme dans l'Amérique des années 20 et 30. Romantique, virulent, plein d'humour, Wolfe invite le lecteur à partager ses révoltes et ses émerveillements.
Depuis la publication de Alphabetical Africa en 1974, Walter Abish n'a cessé d'explorer les pouvoirs et les failles du langage.
Influencés par l'oeuvre d'écrivains (Flaubert, Kafka, Borges ou Perec) et de cinéastes (Buñuel ou Godard), les textes de Walter Abish subvertissent les modes de perception de la réalité. Dans un processus constant de " défamiliarisation ", romans et nouvelles mettent à nu une réalité passée au crible de l'humour et de l'ironie de cet écrivain majeur qui n'est pas sans rappeler les auteurs de l'OULIPO.