Écrit en 1939, à l'aube de la Seconde Guerre mondiale, «Cicéron» occupe une place très importante dans l'oeuvre de Stefan Zweig. Dans ce récit, resté inédit en allemand et en français durant plusieurs décennies, l'écrivain autrichien évoque les combats, en vain, du célèbre auteur romain durant les dernières années de sa vie pour sauver la République face à l'avènement de la dictature. Au croisement de la nouvelle et de la biographie, se dessine en filigrane l'histoire de Zweig. Sous sa plume, Cicéron devient le symbole universel de la lutte de l'humanisme contre la dictature, et des multiples formes de résistance que l'homme de lettres - par l'esprit, la parole et la plume - peut opposer à la violence du pouvoir.
Personnage incontournable de notre héritage intellectuel et artistique, figure presque nietzschéenne avant l'heure, Diogène prône et pratique le renversement de toutes les valeurs. C'est un être unique que nous rencontrons ici, appliquant d'abord à lui-même ses idées décapantes sur le pouvoir, la liberté, le plaisir, la servitude, l'amitié, les animaux, l'éducation ou la sexualité ; un homme bien souvent incompris, aux reparties cinglantes, menant seul au nom de la vertu un véritable combat, armé d'un rire dévastateur qui mérite toujours d'être entendu.
Ces maximes sont l'oeuvre d'une vie. Elles procèdent d'un même sens. C'est la tentative de réunir les contraires et d'établir une harmonie entre la pensée et l'action. Dans ce jeu entre le statique et le dynamique, dans ces perpétuels renvois et ces apparentes contradictions se situe la sagesse de ce livre : « Trouver son rapport à soi-même, aux autres et aux choses. » À l'inverse des choses, l'homme n'a pas de place prédéterminée dans le monde qu'il n'appréhende jamais de façon immédiate. L'effort d'une vie est de l'affirmer : s'intégrer dans l'ordre toujours juste des choses en restant homme.
"En lisant et relisant Oscar Wilde au cours des années, je me suis aperçu de quelque chose qui semble avoir échappé à tous ses admirateurs : Wilde a toujours raison. Oscar Wilde fait partie de ces écrivains privilégiés qui existent sans avoir besoin de l'approbation des critiques, ni même de celles des lecteurs. Le plaisir que nous tirons de sa compagnie est irrésistible et constant." (Jorge Luis Borges) Ces textes, qui constituent une sorte de bréviaire d'Oscar Wilde critique, sont présentés dans la traduction historique de Jules Cantel qu'avait autorisée l'auteur lui-même.
Peu de rencontres ont suscité autant d'intérêt que celle de Rimbaud et Verlaine en septembre 1871. À son arrivée à Paris, le jeune poète ardennais apparaît à l'auteur des «Poèmes saturniens »comme un enfant « au visage parfaitement ovale d'ange en exil ». Ce sera le début d'une relation tumultueuse et féconde, qui prendra brusquement fin en juin 1873 à Bruxelles. L'intensité de cette liaison s'est transmise à la création des deux écrivains, qui dès 1872 partagent leurs élans de renouvellement poétique. Verlaine devient ainsi un témoin privilégié de son compagnon tant sur le plan humain que littéraire. C'est à travers ce rôle de témoin que Verlaine a « inauguré la gloire » de Rimbaud, comme il l'admettra lui-même, en publiant plusieurs de ses poèmes inédits et en les commentant. Ces pages, souvent émues, restituent le visage authentique du poète de Charleville.
Inédit en français, "Aphorismes et définitions" dévoile une facette moins connue d'un des plus grands auteurs espagnols du vingtième siècle.
" De la vanité ", notait Pierre Villey dans son édition des Essais, a une importance exceptionnelle : il " domine tout le troisième livre ", qui domine les Essais. Comme Montaigne domine - avec quelques autres - la littérature française, il n'y a pas grand risque à affirmer que nous sommes là devant un texte majeur. Un chef-d'oeuvre ? C'est peu dire, et en même temps c'est trop : ce texte, l'un des plus beaux que nous ayons, l'un des plus vrais, est aussi le moins prétentieux, le moins pontifiant, le moins fabriqué qui soit.
Si c'est un chef-d'oeuvre, et bien sûr c'en est un, c'est un peu par hasard, ou plutôt par cette nécessité imprévisible qu'on appelle aujourd'hui le génie et qui n'est autre, s'agissant de Montaigne, que Montaigne lui-même, avec son goût extrême pour la vérité, ce mépris de l'artifice, et cette liberté sans égale d'allure et de ton." (André Compte-Sponville)
À la fin de sa vie, Voltaire rendu illustre depuis longtemps par ses grandes oeuvres théâtrales, poétiques, historiques, philosophiques, entretient un dialogue avec ses lecteurs de toute l'Europe. Il publie une multitude d'articles, qui circulent et sont ensuite réunis dans des volumes de «Mélanges». Il y donne de façon incisive et souvent humoristique son opinion sur toutes sortes de sujets ; le lecteur pressé y retrouve l'essentiel de sa pensée et son inimitable tour d'esprit. Cette ironie n'empêche pas le vieux philosophe des Lumières de proposer par petites touches brillantes une sagesse tolérante faite de la recherche, malgré la folie et les horreurs du monde, d'un bonheur raisonnable.
Partant de la femme, de la différence entre l'homme et la femme, ce recueil se conclut par un retour sur l'enfance. Entre les deux il y a toute la panoplie du monde : la morale, l'érotisme, le christianisme, la presse, le théâtre, la politique, la bêtise, etc. La succession des thèmes y est autant désinvolte que réfléchie. Il ne s'agit pas en effet d'un recueil disparate, une simple succession de bons mots mais d'un véritable traité : à la fois système du monde et sa déconstruction.
Kraus révèle ici en raccourci tout le chatoiement de sa pensée : il est irritant et enthousiasmant, réactionnaire et progressiste, injuste et pertinent. Impertinent toujours !
Contrairement à ce que laisserait penser son titre, qui induit une pensée ramassée en quelques mots, on trouve dans Aphorismes des réflexions qui font parfois plus d'une page, comme si Kraus se moquait lui-même du cadre qu'il se donnait : " Un aphorisme n'a pas besoin d'être vrai, mais il doit dépasser la vérité. " Ou encore : " L'aphorisme ne recouvre jamais la vérité ; il est soit une demi-vérité, soit une vérité et demie. " On sent là une pensée en gestion, résolue à ne pas se fixer sur une vérité unique mais cherchant l'équilibre du monde dans l'oscillation perpétuelle des choses.
La reine Christine (1626-1689), pendant son règne, a fait de Stockholm l'Athènes du Nord. Sa grande curiosité intellectuelle et sa vaste culture l'amènent à correspondre avec toute l'Europe savante et attirent Descartes à sa cour, où il meurt en 1651. Après avoir régné dix ans, cette femme énigmatique abdique avec éclat, à l'âge de vingt-sept ans. Ses Maximes, à la fois cyniques et exaltées, dont nous présentons ici un choix, ont été écrites directement en français. Leur style, lapidaire et sans réplique, évoque celui de son contemporain La Rochefoucauld, dont elle a médité et commenté les Maximes.